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LES SUPERCALCULATEURS

 


 

 

 

 

 

les supercalculateurs

Publié le 29 mai 2017
       
Un supercalculateur est un très grand ordinateur, réunissant plusieurs dizaines de milliers de processeurs, et capable de réaliser un très grand nombre d’opérations de calcul ou de traitement de données simultanées. Les superordinateurs sont utilisés par les scientifiques et les industriels pour concevoir de nouveaux systèmes et objets (moteurs, avions, voitures), des matériaux ou des médicaments ; simuler des phénomènes physiques complexes (séismes, formation des étoiles, galaxies ou même Univers entier…) ; réaliser des prévisions (météorologie, climat) ; ou réaliser virtuellement des expériences difficilement réalisables en laboratoire.

COMMENT FONCTIONNE
UN SUPERCALCULATEUR ?
Dans les années 1930, les ordinateurs – ou calculateurs – effectuaient une opération par seconde. Aujourd’hui, les supercalculateurs les plus puissants réalisent des dizaines de millions de milliards d’opérations par seconde.
De tels progrès ont été possibles grâce à la miniaturisation des processeurs et des mémoires mais aussi grâce à une organisation particulière de ces calculateurs et de leur environnement à différentes échelles.


UN FONCTIONNEMENT EN « GRAPPE »

Pour réaliser autant d’opérations simultanées, les supercalculateurs effectuent les calculs « en parallèle », c’est-à-dire en les répartissant sur différents processeurs. Ceux-ci sont organisés en « grappe » de « nœuds de calcul », connectés par un réseau ultrarapide. Les nœuds de calcul mettent en commun leurs mémoires pour former une mémoire « distribuée » de très grande taille, et sont reliés à des espaces de stockage de plus grande taille encore. L’architecture détaillée des nœuds de calcul est également devenue un élément déterminant pour optimiser leur fonctionnement.
Les performances d’un supercalculateur décrivent ses capacités à exécuter des calculs mais aussi à traiter de très grands volumes de données. A ce niveau, on parle de « calcul haute performance » (ou « HPC », pour High Performance Computing en anglais) et la vitesse de traitement des opérations s’exprime principalement en Flops (Floating Point Operations Per Second, opération de base pour du calcul numérique, soit addition ou multiplication décimale).


LES SUPERCALCULATEURS  :
DES CAPACITÉS DE STOCKAGE GIGANTESQUES

Physiquement, les supercalculateurs sont constitués de nombreuses armoires (baies), reliées entre elles par des kilomètres de câble réseau (interconnexion ultra-rapide des nœuds de calcul) et regroupées dans des centres de calcul. Un centre de calcul comprend aussi de gigantesques capacités de stockage local de données auxquelles les ordinateurs doivent pouvoir accéder rapidement (dizaines de « petaoctets », contrepartie des dizaines de « petaflops » de puissance de calcul).
Comme ces machines sont de plus en plus puissantes et denses, leur consommation électrique devient très importante et dégage énormément de chaleur – tant dans les processeurs que dans les mémoires et réseaux de communication. Il faut donc mettre en place un système de refroidissement efficace et lui-même le moins énergivore possible - par exemple par circulation d’eau dans les portes des armoires ou dans les nœuds de calcul - ainsi qu’une climatisation dans la salle machine. Bien optimisés, ces systèmes de refroidissement consomment une fraction minoritaire de la consommation électrique globale, l’essentiel de l’énergie apportée au centre de calcul peut alors servir directement aux calculs et traitements de données et les coûts de fonctionnement sont mieux maîtrisés

LES SUPERCALCULATEURS, DES OUTILS ESSENTIELS POUR LA MODÉLISATION ET L’ANALYSE DES DONNÉES AU PROFIT DE LA SCIENCE ET DE L’INDUSTRIE

Grâce aux progrès des supercalculateurs, la simulation numérique – calculs permettant de représenter un phénomène physique ou complexe sur un ordinateur – s’est généralisée à toutes les disciplines au point de devenir le « troisième pilier » de la méthode scientifique, aux côtés de la théorie et de l’expérimentation.

La simulation numérique permet de mener des « expériences virtuelles » qui remplacent ou complètent les expérimentations lorsque celles-ci sont dangereuses (accidents, crash tests), à des échelles de temps trop longues ou trop courtes  (climatologie, physique atomique), à des échelles de taille trop petites ou trop grandes   (protéines, astrophysique) ou encore interdites (essais nucléaires)…
Depuis quelques années le calcul intensif, producteur de masses de données de plus en plus importantes, devient également un maillon indispensable du traitement des « mégadonnées » d’autres origines (expériences, observations, réseaux de capteurs, Internet…). Les techniques et méthodes du calcul haute performance (HPC) se retrouvent ainsi au cœur de processus mêlant production et analyse de données, modélisation numérique, techniques statistiques et d’apprentissage, intelligence artificielle...
Véritable fer de lance de ces approches, le HPC est la déclinaison la plus avancée à un moment donné de traitements parallèles qui se retrouvent souvent employés ou diffusés largement, à plus petite échelle et à terme, dans tous les secteurs de l’informatique.

LES DIFFÉRENTES ÉTAPES
D’UNE SIMULATION NUMÉRIQUE
Les différentes étapes d’une simulation numérique

Prenons l’exemple d’un chercheur ou d’une équipe de recherche recourant au HPC. Les moyens de calcul sont fournis par des centres de calcul régionaux, nationaux ou encore internationaux. L’accès à ces ressources se fait souvent via des dossiers de demande préparés à l’avance, parfois soumis à des processus de sélection compétitifs.

L’activité complète de modélisation/simulation comporte plusieurs étapes :

*         Décrire la réalité : les phénomènes physiques sont souvent complexes. Pour les représenter, les physiciens prennent en compte de nombreuses lois physiques, par exemple celles qui régissent les relations entre la vitesse, la température et la pression dans un fluide.
*        
*         Modélisation : Les lois physiques sont traduites en équations mathématiques, faisant intervenir l’ensemble des paramètres pertinents.
*        
*         Résolution numérique et programmation : les équations mathématiques, trop complexes pour être calculées humainement, doivent être traitées par un ordinateur. Comme celui-ci ne peut les résoudre en tous points et de manière continue, les mathématiciens les scindent en plus petits intervalles. Les équations sont calculées pour chacun des points et des instants pertinents. L’enchaînement des calculs à réaliser s’appelle un algorithme. En général, en simulation numérique, il s’agit au final de nombreuses additions et multiplications traduisant l’évolution des quantités physiques. Pour que l’ordinateur puisse exécuter l’algorithme, celui-ci est converti en langage informatique par les informaticiens.
*        
*         Validation : les trois étapes précédentes produisent un logiciel de calcul dont il faut assurer la mise au point « physique » (on parle de validation) et pas uniquement « informatique » (ici on parle de vérification). Il s’agit de délimiter la justesse physique des résultats pour certains domaines dans lesquels on peut se fier au logiciel. La comparaison avec des expériences ou résultats déjà connus est un ingrédient de la validation. De plus en plus, on recherche aussi l’estimation des incertitudes ou des sensibilités des calculs vis-à-vis de leurs paramètres. A défaut de réduire totalement les erreurs ou incertitudes, leur encadrement est apprécié.
*        
*         Ces quatre étapes ne sont pas nécessairement reproduites à chaque étude. L’effort de mise au point d’un environnement de simulation (logiciel de calcul et tous les outils complémentaires tels que la visualisation des résultats) se fait en amont soit par une équipe de recherche ou un groupement d’équipes, parfois par des sociétés logicielles spécialisées, et il est amorti sur des durées parfois très longues – années voire décennies.
*        
*         5. Exécution de simulations : grâce aux moyens de plus en plus performants mis à leur disposition par les spécialistes concevant les supercalculateurs et les centres de calcul, les physiciens et ingénieurs lancent leurs simulations numériques. Puis les résultats sont conservés dans des espaces de stockage de grande capacité, conçus pour un accès performant et pérenne. Les utilisateurs peuvent en général visualiser leurs données sur leur poste de travail de façon interactive, parfois directement connectés au système de stockage du centre de calcul - les masses de données concernées par le post-traitement peuvent en effet excéder les capacités locales de recopie ou les capacités de débit du réseau entre site de calcul et laboratoire.


Les enjeux de la simulation numérique

La simulation numérique a pour objectifs :
*         De comprendre et faire progresser la science, dans tous les domaines ;
*         De concevoir : dans l’industrie, la simulation numérique permet de réduire le nombre de tests nécessaires au développement des produits, et donc le coût et la durée des étapes de recherche, développement, et conception. Ainsi, elle améliore la productivité, la compétitivité et la capacité d’innovation des entreprises dans tous les secteurs : aéronautique, cosmétique, bâtiment…
*         D’agir et décider : dans le domaine de la sécurité vis-à-vis des risques naturels ou industriels, de la santé, de l’environnement, de la prévision climatique..., la simulation numérique permet de répondre à des enjeux sociétaux.

 

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LES ÉVÉNEMENTS CLIMATIQUES EXTRÊMES

 

 

 

 

 

 

 

LES  ÉVÉNEMENTS  CLIMATIQUES  EXTRÊMES

« Ouragan du siècle », « Canicule extrême » ou encore « Événement Cévenol ». Depuis quelques années, ces termes sont à la une des médias face à la survenance de phénomènes météorologiques extrêmes. Ces événements de natures très variées, le plus souvent inattendus et violents, nous semblent survenir bien plus fréquemment. Mais est-ce vraiment le cas ? Et si oui, peut-on établir un lien avec le réchauffement climatique ?

LES EXTRÊMES MÉTÉOROLOGIQUES
Même parmi les scientifiques, la notion d’événement météorologique extrême reste difficile à définir. En effet, statisticiens, physiciens et spécialistes des sciences sociales ont chacun leur définition d’événement météorologique extrême. Bien que ces trois définitions soient complémentaires, elles ont chacune une dimension propre.
Pour les statisticiens, un extrême sera nommé ainsi si une mesure (température, vitesse du vent) dépasse les valeurs communément rencontrées. Ce sont les chiffres qui déterminent si oui ou non un événement est extrême.

Une seconde définition est donnée par les physiciens : l’extrême correspond à une catégorie d’événement (cyclone tropical, tempête extra-tropicale, vague de chaleur, sécheresse, etc.) qui dépend de la région et de sa description phénoménologique.

Enfin, les spécialistes des sciences sociales définissent l’événement par les dégâts causés. En ce sens, un événement sera dit extrême lorsqu’il touche la société. Un événement aura plus tendance à être qualifié d’extrême dans ce cas que s’il se déroulait dans un lieu sans habitation (par exemple dans le désert) car il n’est à l’origine ni de dégât matériel, ni de perte humaine. Aussi, un événement climatique sera considéré comme extrême s’il se déroule dans un lieu où la population n’est pas habituée à se protéger contre un type d’événement particulier. Par exemple, en France, la population est moins habituée à recevoir beaucoup de chutes de neige, contrairement au Canada où la population est préparée et habituée à faire face à ce type d’événement.

Les critères de détermination d’un événement extrême diffèrent en fonction du lieu. Par exemple, on parle de canicule à Toulouse quand pendant au moins trois jours, les températures la nuit sont au-dessus de 21 °C et quand en journée les températures dépassent les 36 °C. Alors qu’à Brest, une canicule est avérée si pendant au moins trois jours il fait plus de 16 °C la nuit et plus de 28 °C en journée.

Classement des extrêmes
Les extrêmes météorologiques peuvent se classer en deux catégories en fonction de leur durée : des phénomènes longs persistant plusieurs semaines ou plusieurs mois (telle une sécheresse) et d’autres, souvent très intenses, dont la durée se limite à quelques heures voire quelques jours.

LES ROUAGES DES EXTRÊMES
Les mécanismes des extrêmes météorologiques sont complexes. Par exemple, la canicule de l’été 2003 est la conséquence de mouvements de masses d’air sur une très vaste étendue spatiale (plusieurs milliers de kilomètres de rayon). Les conditions à réunir pour provoquer une vague de chaleur sont multiples et peuvent être annulées par quelques jours de précipitations. D’où l’extrême difficulté à prévoir leur occurrence quelques semaines à l’avance même s’il est clair qu’une augmentation des températures augmente le risque de survenue des canicules.
L’apparition des autres phénomènes climatologiques extrêmes (vagues de froid, tornades, tempêtes, etc.) est la résultante également de multiples facteurs et de leurs interactions, qu’il peut être très compliqué de modéliser et de prévoir.

COMPRENDRE LE PASSÉ POUR DÉTERMINER LES CAUSES DES PHÉNOMÈNES CLIMATIQUES EXTRÊMES

L’étude du climat du passé est l’une des pistes qui permet aux scientifiques d’établir un lien entre les extrêmes météorologiques (sécheresse, vagues de froid par exemple) et l’évolution des températures moyennes.
Certains historiens comme E. Le Roy Ladurie se sont penchés sur les archives, à la fois nationales mais aussi parfois très localisées et détaillées telles que des registres paroissiaux, dans lesquelles on trouve la trace de certains événements météorologiques ayant particulièrement marqué la population (tempêtes, épisodes de chaleur ou de froid, destruction de bâtiments, récoltes dévastées, etc.). La description des effets et des dégâts causés donne une approximation du niveau de violence de ces phénomènes subis par nos ancêtres. Des documents relatent que la sécheresse était particulièrement redoutée par les sociétés rurales car celle-ci mettait en danger les récoltes. Cette frayeur de la sécheresse était si grande que des processions pro pluvia s’organisaient pour implorer l’arrivée de la pluie.
Grâce à ces données et à celles que l’on peut analyser aujourd’hui (analyse de cernes de croissance des arbres, carottes glaciaires etc.), les chercheurs peuvent en savoir plus sur les événements extrêmes du passé et ainsi les comparer à ceux d’aujourd’hui. Par exemple, des historiens suisses (O. Wetter et C. Pfister) ont reconstruit, après avoir étudié de nombreuses archives, une canicule potentiellement pire que celle de 2003 qui aurait touché l’Europe… en 1540.

QUEL LIEN AVEC LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ?

Aujourd’hui, certains extrêmes météorologiques sont liés à la température moyenne du globe, et à son augmentation en raison du réchauffement climatique. Si le lien n’est pas encore totalement élucidé et fait l’objet de nombreux débats scientifiques, il est bien possible, dans certains cas, d’affirmer que le réchauffement climatique est responsable de l’augmentation de l’intensité des précipitations de pluie et de neige. Ceci s’explique par la relation thermodynamique de Clausius-Clapeyron, qui dit que la quantité d’eau sous forme de vapeur présente dans l’atmosphère augmente avec la température.

Ce phénomène se ressent notamment au sud de l’Italie où des vagues de froid entraînent d’importantes précipitations neigeuses depuis le début des années 2000, alors que l’on sait que par le passé il ne neigeait pas autant dans cette région. La mer Méditerranée étant plus chaude, elle crée une évaporation d’eau qui vient ensuite se transformer en chutes de neige une fois sur les terres. Le cycle de l’eau se voit impacté par le réchauffement climatique. 

Mais le réchauffement climatique n’a, a priori, aucun effet sur le déclenchement des cyclones. On constate d’ailleurs que le nombre de tempêtes extratropicales et de cyclones tropicaux n’a pas augmenté au cours des dernières décennies. Cependant, le réchauffement climatique participe à l’augmentation des précipitations survenues pendant les cyclones (c’est la relation de Clausius-Clapeyron).

En revanche, l’augmentation du nombre de canicules est clairement corrélée au réchauffement climatique. En effet, il y a plus de canicules au 21e siècle qu’au début du 20e siècle.  L’explication de cette corrélation est toujours débattue.

La question du lien entre réchauffement climatique et la multiplication des événements climatiques extrêmes enregistrés par les météorologues ne trouve donc pas de réponse définitive ni absolue. Elle diffère selon le type d’événement concerné. Si elle ne fait guère de doute pour certains événements, pour d’autres, elle nécessite encore de nombreuses données avant d’établir un éventuel lien de causalité.

Le lien entre le développement de nos connaissances sur le climat et la prévision des impacts météorologiques extrêmes reste un défi posé aux scientifiques s’intéressant au climat. Cela nécessite un travail en étroite collaboration entre des disciplines qui se sont ignorées pendant des décennies. Plusieurs initiatives nationales et internationales comblent ces fossés, entre sciences du climat, droit, économie et sciences sociales d’une manière générale.

 

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La supraconductivité et ses applications

 


 

 

 

 

 

La supraconductivité et ses applications

Publié le 7 septembre 2016

Découvert en 1911, le phénomène de supraconductivité continue de fasciner et trouve aujourd’hui de nombreuses applications dans les domaines de la santé, de l’énergie, des transports, des instruments de recherche pour l’analyse chimique et structurale (analyse RMN) ou encore des grands accélérateurs pour étudier les particules élémentaires.

QU’EST-CE QUE LA SUPRACONDUCTIVITÉ ?

À l’état supraconducteur, un matériau refroidi à très basse température acquiert la capacité de conduire parfaitement un courant électrique, sans résistance, et donc sans perte d’énergie. De même, à l’état supraconducteur, les matériaux possèdent la propriété d’expulser totalement le champ magnétique qui les entoure, ce qui peut se manifester par des effets spectaculaires de lévitation magnétique.


Le phénomène de supraconductivité a été découvert en 1911 par le physicien Heike Kammerlingh Onnes. Traduit par des propriétés électriques, magnétiques et quantiques spécifiques, il apparaît lorsque l’on refroidit certains métaux ou alliages à très basses températures, proches du zéro absolu, 0 kelvin soit - 273,15 °C. Appelée température critique (Tc), la température à laquelle le matériau devient supraconducteur dépend de la composition chimique de celui-ci. Pour la plupart des matériaux, dits supraconducteurs conventionnels, elle se situe entre 1 et 33 kelvins (soit entre - 272 et – 240°C), ce qui nécessite un refroidissement à l’hélium liquide, voire au-delà.


Depuis 1986, des oxydes de cuivre ou cuprates, appelés supraconducteurs à haute température critique (haut-Tc) ou supraconducteurs non conventionnels, peuvent être refroidis à l’azote liquide (à 77 K soit - 196°C). Dans les conditions usuelles, ce sont les cuprates de mercure qui détiennent actuellement le record de température critique : 135 K (- 138°C). En 2008, des scientifiques ont réussi à synthétiser une nouvelle famille de supraconducteurs à haute température critique : les pnictures (Tc = 55K, soit - 218°C). Possédant des propriétés différentes des cuprates, ces matériaux suscitent également beaucoup d’intérêt depuis leur découverte. Enfin, sous très haute pression (1,5 mégabar, soit la moitié de la pression au centre de la Terre), le sulfure d'hydrogène (H2S) devient supraconducteur en dessous de la nouvelle température de -70° C.

QUELLE EST L’ORIGINE DE LA SUPRACONDUCTIVITÉ ?
La supraconductivité est un phénomène quantique collectif. C’est une des manifestations possibles, et perceptible à notre échelle, du comportement quantique de la matière.
Dans les matériaux supraconducteurs classiques, les électrons se regroupent par paires (dites paires de Cooper), en interagissant avec les atomes présents autour d’eux. Ils forment alors une vague collective. Cette vague électronique se propage comme une onde, sans subir de collision avec les défauts présents dans la matière, ce qui permet de conduire du courant électrique sans perte d’énergie. Ce phénomène ne peut se produire qu’à basse température lorsque les atomes du matériau ne vibrent pas trop (sinon les paires d'électrons se scindent et la résistance électrique du matériau réapparait).

EXEMPLES D’APPLICATIONS
DE LA SUPRACONDUCTIVITÉ

La compréhension et la maîtrise des principes de la supraconductivité est à l’origine de nombreuses applications. L'absence de résistance du matériau supraconducteur d'une bobine électrique permet en particulier de générer des champs magnétiques très intenses (plusieurs teslas). L’IRM, qui a révolutionné le diagnostic médical et la compréhension du cerveau, nécessite des champs magnétiques intenses qui peuvent être obtenus grâce à la maîtrise de ce phénomène ; les transports, les télécommunications, l’électronique, l’informatique,… peuvent également exploiter ses propriétés. En outre, sans supraconducteurs, les très grands instruments de recherche tels que l’accélérateur de particules LHC aujourd’hui, ou Iter demain, ne pourraient voir le jour.

Imagerie médicale
S’il est un domaine dans lequel la supraconductivité a joué un rôle essentiel, c’est celui de l’imagerie médicale. La technologie de l’IRM, outil de diagnostic et de recherche désormais incontournable, est en effet une retombée directe des recherches menées sur le sujet. Spécifiquement, la base d’une IRM est de créer un champ magnétique très fort et homogène sur un volume suffisant afin qu'une proportion significative des protons de l’eau du corps du sujet (quelques protons par million) ait un "axe de rotation sur eux-mêmes" aligné. Cette première difficulté technologique, est résolue avec la supraconductivité, qui permet de disposer de champs magnétiques intenses, stables et uniformes.
Outre l’IRM haut champ, la supraconductivité intervient dans la fabrication des capteurs magnétiques qui sont à la base d’autres techniques d’imagerie médicale : l’IRM bas champ (où, au lieu de renforcer la polarisation par un champ magnétique très intense, on utilise un capteur très sensible), la magnétoencéphalographie (MEG) et la magnétocardiographie (MCG).

Les très grands instruments de recherche
La supraconductivité joue aujourd’hui un rôle prépondérant dans la conception et la réalisation des très grands instruments dédiés à l’exploration de la matière. Employée dans les accélérateurs de particules pour développer les électroaimants supraconducteurs qui dévient et focalisent les faisceaux, elle intervient également dans le domaine des cavités radiofréquence (RF) qui génèrent le champ électrique qui accélère les particules chargées au centre du faisceau.
L’emploi de matériaux supraconducteurs a un triple avantage :  
*         l’absence de résistivité des supraconducteurs, qui évite toute dissipation d’énergie, permet de gagner en puissance sans augmenter la consommation de l’installation ;
*         grâce à l’annulation de l’effet joule (échauffement dû à la résistivité du matériau), il devient possible de faire passer de grandes densités de courant dans des bobinages très compacts. La densité alliée à la compacité permettent d’obtenir des champs magnétiques beaucoup plus élevés ;
*         la supraconductivité permet de générer des champs magnétiques très puissants, pouvant atteindre jusqu’à 20 teslas.

Fusion nucléaire
La supraconductivité trouve également des applications dans le domaine de la fusion nucléaire. L’une des pistes étudiées pour tenter de reproduire sur Terre l’énergie des étoiles repose sur la conception d’une machine appelée sous son acronyme russe « Tokamak ».
En forme d'anneau (ou « tore »), les particules qui y sont injectées subissent des champs magnétiques si intenses qu’elles restent fortement confinées dans la partie centrale de l’anneau, sans contact avec les parois et peuvent ainsi provoquer des réactions de fusion. Pour produire de tels champs, on utilise des bobines réalisées à partir de matériaux supraconducteurs.

OÙ EN EST LA RECHERCHE SUR LA SUPRACONDUCTIVITÉ ?
Si les mécanismes à l’origine de la supraconductivité dans la majorité des matériaux, dits supraconducteurs conventionnels, sont élucidés depuis longtemps et bien compris, ce n’est pas le cas des supraconducteurs à haute température critique (cuprates et pnictures). Il s’agit d’un des principaux sujets de recherche actifs dans le domaine de la supraconductivité qui oblige les physiciens à élaborer de nouveaux matériaux et à inventer différentes façons de mesurer leurs propriétés ainsi que de nouveaux concepts pour les décrire.
En synthétisant de nouveaux échantillons supraconducteurs et en analysant leurs propriétés, les chercheurs espèrent percer les derniers mystères de la supraconductivité afin d’arriver à l’obtention du même phénomène à plus haute température et peut-être un jour découvrir une supraconductivité encore plus proche de la température ambiante, ce qui ouvrirait de nouveaux champs d’applications.

 

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LA PHYSIQUE QUANTIQUE (PHILIPPE GRANGIER) (1)

 

LA PHYSIQUE QUANTIQUE (PHILIPPE GRANGIER)

Nous décrirons des expériences permettant de mettre en évidence des propriétés simples et fondamentales de la physique quantique, comme l'existence de superpositions linéaires d'états, ou celle d'états "enchevêtrés" ou "intriqués". Nous montrerons ensuite comment de tels états peuvent être utilisés dans le domaine très actif de "l'information quantique", pour réaliser des dispositifs de cryptographie parfaitement sûrs, ou pour effectuer certains calculs de manière potentiellement beaucoup plus efficace qu'avec des ordinateurs usuels.

ranscription* de la 574e conférence de l'Université de tous les savoirs prononcée le 17 juin 2005
Par Philippe Grangier: « La physique quantique »
La Physique Quantique est un sujet extrêmement vaste, et je n'aurai pas la prétention d'en présenter tous les aspects dans cet exposé. Je vais plutôt tenter d'illustrer quelques principes de base à travers des exemples simples, et aussi essayer de vous faire part de l'excitation actuelle qui existe dans ce domaine, à cause de résultats apparus récemment.
Dans mes exemples, je parlerai beaucoup du photon, vous savez aussi que c'est le « Licht Quanten », le quantum de lumière qui a été introduit par Einstein en 1905 dans un article extrêmement célèbre qui fête cette année son centenaire.
Je vous parlerai donc d'idées et de concepts, mais aussi d'expériences, et en particulier de celles que nous avons faites à l'Institut d'Optique à Orsay. J'ai travaillé au cours des années avec Alain Aspect, Jean-François Roch et puis beaucoup de chercheurs et d'étudiants qui sont dans nos groupes de recherche, et je saisis l'occasion pour tous les remercier ici.
Qu'est ce donc que la physique quantique ? En fait, la physique quantique dérive de la mécanique quantique, une théorie fondatrice qui, après une lente période de maturation, est apparue extrêmement vite entre 1925 et 1927. Les premières idées vraiment quantiques, proposées par Planck en 1900, ont été suivies de 25 années de maturation et d'incertitudes, et puis brutalement la théorie est apparue, sortant en quelque sorte toute bottée de la cuisse de Jupiter. On l'utilise encore aujourd'hui pratiquement comme elle a été faite, et on apprend aux étudiants des méthodes de calculs qui ont été inventées par Dirac à la fin des années 1920.

Donc la mécanique quantique est une construction intellectuelle tout à fait grandiose, je pense que c'est un candidat valable au titre de plus grande aventure intellectuelle du 20ème siècle, c'est-à-dire plus grande que la relativité, le marxisme, ou la psychanalyse. C'est une révolution à la fois scientifique et conceptuelle qui est à la base de toute notre compréhension physique du monde qui nous entoure. Par exemple, ne serait-ce que la stabilité de la matière est incompréhensible en physique classique. Un électron tourne autour d'un noyau, donc il rayonne, donc il émet de l'énergie, donc il doit perdre son énergie et tomber sur le noyau. Par conséquent en physique classique, la matière devrait disparaître. Cela semble stupide, mais c'est comme ça ! On a besoin de la mécanique quantique pour expliquer l'existence de la matière. Le fait que la matière puisse être stable est un fait intrinsèquement quantique, qui est intimement lié à ce qu'on appelle les inégalités de Heisenberg. Et bien sûr, la théorie explique non seulement comment la matière peut être stable, mais aussi comment elle est faite. La mécanique quantique a été inventée pour expliquer les niveaux d'énergie de l'hydrogène, puis de tous les autres atomes, et cela fonctionne très bien. La théorie a aussi expliqué la lumière, les photons, je vais beaucoup revenir là-dessus, ainsi que la quantification de la lumière et l'interaction entre la matière et le rayonnement.

La théorie quantique a ainsi obtenu depuis la fin des années 1920 un nombre gigantesque de succès. Le formalisme est cohérent, les équations sont parfaitement maîtrisées, on sait très bien calculer, et on peut obtenir des résultats avec douze chiffres significatifs en très bon accord avec l'expérience. La physique quantique a d'innombrables applications : le transistor, que vous connaissez tous, qui est à la base de la microélectronique, de l'informatique qui a complètement révolutionné notre vie au cours des dernières années, le laser, qui est à la base des télécommunications optiques et d'Internet, et qui joue des rôles essentiels en médecine et en biologie. Tous ces objets, qui font partie de notre vie de tous les jours, auraient été inconcevables si on n'avait pas eu la mécanique quantique. Ces succès sont donc tout à fait remarquables mais, il y a un mais, la mécanique quantique conserve un caractère mystérieux. Elle est un peu bizarre, et ce n'est rien de le dire. En fait, c'est une théorie intrinsèquement non-déterministe, c'est-à-dire que même si on sait « tout » au départ, il existera certains résultats de mesures qu'on ne pourra pas prédire avec certitude. Il y a donc une incertitude, un indéterminisme intrinsèque qui font partie des fondements mêmes de la théorie, et qui en fait jouent un rôle très important, je reviendrai beaucoup sur cette question dans la suite.

Il y a aussi une espèce de non-localité, c'est-à-dire que lorsqu'on parle d'objets quantiques, même très étendus, les distances ne veulent plus vraiment dire la même chose que dans notre environnement habituel. Par exemple, plusieurs particules spatialement séparées peuvent constituer un seul objet quantique, et réagir globalement. Einstein n'a jamais admis cette idée, et il a souligné qu'elle constitue un problème conceptuel important, qui est sous-jacent et en fait inhérent à la théorie quantique.
Enfin, il n'y a pas de correspondance simple entre les objets quantiques et le monde macroscopique, c'est-à-dire que si l'on s'imagine être « dans » le monde quantique les choses sont réellement bizarres, je reviendrai là-dessus dans la suite. On peut ainsi dire que les portes sont à la fois ouvertes et fermées, que les objets sont à plusieurs endroits à la fois, et que de toute manière leur comportement, qui est parfaitement bien décrit par les équations que l'on connaît, est en contradiction flagrante avec l'intuition macroscopique.
Donc pour utiliser la mécanique quantique - avec beaucoup de succès je le répète - il a fallu au cours des années se construire une espèce d'intuition qui permet d'oublier ou de glisser sous le tapis ces petits mystères, en les gardant tout de même dans un coin de la tête.

Mais depuis vingt ans environ, ces questions qu'on avait un peu oubliées depuis les années 1930 sont remontées à la surface, c'est ce qu'Alain Aspect a appelé dans un livre qui est paru aux éditions Odile Jacob, la « seconde révolution quantique ». Une des origines de cette seconde révolution quantique est qu'on a appris depuis une vingtaine d'années à avoir directement accès au monde des atomes. En fait, les inventeurs de la mécanique quantique raisonnaient sur des ensembles statistiques, des grandes quantités d'atomes. Ils calculaient ainsi des valeurs moyennes, et ils savaient très bien le faire. Mais la manipulation d'un atome unique était quelque chose de pratiquement inconcevable pour eux, alors que maintenant, comme je vais vous le montrer, on sait le faire tous les jours dans les laboratoires. Et on a aussi réalisé que les propriétés paradoxales dont j'ai parlé, les superpositions linéaires, les portes ouvertes et fermées, la délocalisation quantique, qui apparaissent comme des paradoxes d'un point de vue classique, mais ne sont en fait pas vraiment des paradoxes, car ils sont logiquement cohérents et même indispensables dans le cadre du formalisme quantique.
Le but de cet exposé est donc d'illustrer quelques aspects de cette seconde révolution quantique, à partir d'un certain nombre d'exemples que je traiterai plus ou moins en détail selon les circonstances. Et bien sûr, comme je l'ai déjà dit, ces exemples feront beaucoup intervenir les fameux « Licht Quanten » introduits par Einstein en 1905.
Tout d'abord, un petit peu d'histoire pour vous dire comment on est arrivé à cette idée de photons, car on y est arrivé en fait de manière assez chaotique, et l'idée a été extrêmement difficile à « digérer » pour les physiciens. J'illustrerai ensuite ce qu'on peut faire en combinant la manipulation d'objets quantiques individuels et la physique quantique, et je parlerai de choses qu'on appelle la cryptographie quantique et la téléportation quantique, on verra tout cela tout à l'heure.

Commençons donc par un peu d'histoire sur la lumière, qui constitue un mystère fascinant depuis l'origine des temps. Le monde a commencé par « Que la lumière soit », vous le savez, et depuis très longtemps, l'homme se demande « de quoi est faite » la lumière. Il y a une très belle image, sur une stèle égyptienne qui est au musée du Louvres, où l'on voit le Dieu Soleil qui inonde une princesse de ses rayons qui sont représentés par des fleurs de lys, c'est joli et poétique. Cette image exprime une vision de la lumière comme une pluie de fleurs, peut être pas de vraies fleurs de lys mais une idée de corpuscules. Une connaissance intuitive des lois de l'optique est aussi apparue assez tôt, c'est ce qu'on voit sur l'image à droite, où il faut remarquer que le personnage sur cette gravure du moyen âge porte des besicles, ce qui prouve qu'on commençait à comprendre un peu les lois de l'optique. Mais l'optique en tant que science a réellement commencé au 16ème et au 17ème siècle. Descartes est un grand nom de cette période, et il a inventé les lois de la réflexion et de la réfraction de la lumière, que les anglais, vous le savez, n'appellent pas les lois de Descartes mais les lois de Snell. Pour Descartes, comme pour tous les gens de l'antiquité, la lumière était composée de particules.

La lumière « ondulatoire » a quant à elle été introduite par Huygens en 1690. Un peu par analogie avec ce qui se passe à la surface de l'eau, Huygens a eu l'idée que la lumière pourrait se propager comme des vagues dans un milieu dont il ignorait la nature. Il l'a donc appelé « éther », et cette analogie s'est révélée très utile. On pouvait ainsi représenter la propagation de la lumière comme une succession de propagations d'ébranlements lumineux. Mais juste après Huygens est arrivé le grand Newton, le Newton de la gravitation universelle, qui a dit que tout cela était faux car il croyait à nouveau que la lumière était formée des particules. Newton a donc renvoyé Huygens à ses travaux, et a tout expliqué avec des corpuscules. Cela a duré encore un siècle et puis nouvelle oscillation : au début du 19ème siècle, sont apparues des méthodes de calculs et des expériences qui ont établi de manière extrêmement probante que la lumière était bien une onde. Un savant français très célèbre a été associé à ces recherches, c'est Augustin Fresnel. Il a fait toute une série d'expériences et de calculs qui ont convaincu l'Académie des Sciences, en prouvant, aussi bien qu'on pouvait prouver à la fois théoriquement et expérimentalement à l'époque, que la lumière était bien une onde. Il a expliqué une multitude de phénomènes et au cours du 19ème siècle, le monde scientifique s'est peu à peu convaincu que la lumière était bien un phénomène ondulatoire.

Ces découvertes ont culminé, dans une série d'équations qui a été établie par Maxwell à la fin du 19ème siècle. Ces « équations de Maxwell » ont l'immense mérite d'unifier l'électricité, le magnétisme, les phénomènes lumineux, les ondes radios qu'on appelait ondes hertziennes. Hertz a en effet montré que les ondes radios étaient de même nature que la lumière, qu'elles se propagent toutes avec une vitesse, ou célérité, de 300 000 Km par seconde, qui d'ailleurs a été mesurée expérimentalement par Foucault et Fizeau, à peu près à la même époque. Cette théorie ondulatoire de la lumière est donc un véritable triomphe, exprimé dans les équations de Maxwell qui sont et demeurent un monument de la physique. Un savant bien connu appelé Lord Kelvin, le Kelvin de la température, disait ainsi à la fin du 19ème siècle que la physique était finie, que l'on avait tout compris, que cela marchait tellement bien que cela ne pouvait pas être faux, mais qu'il restait peut-être deux petits nuages dans le ciel bleu.

Un premier nuage, dont j'ai déjà un petit peu parlé, était que les équations de Maxwell décrivent une lumière ondulatoire, sans vraiment dire dans quoi se propage cette onde. On disait donc qu'elle se propage dans un milieu qu'on appelle « éther », comme Huygens l'avait appelé. Cet éther avait beaucoup de propriétés bizarres, et - grosse surprise ! - des expériences réalisées par Michelson et Morley montraient que la terre était immobile dans l'éther. La situation n'était donc pas très claire, et Kelvin considérait cela comme un petit nuage. L'autre petit nuage venait de ce qu'on appelle le problème de l'équipartition de l'énergie. Les lois de la thermodynamique, bien maîtrisées à la fin du 19ème siècle, disaient que l'on doit attribuer une énergie égale à kT/2 par degré de liberté à un système à l'équilibre à la température T (k est la constante de Boltzmann, et T la température en Kelvin). Si on applique ce principe à un morceau de métal chauffé, on trouve la quantité d'énergie lumineuse qu'il émet est infinie. Donc visiblement il y avait aussi quelque chose qui n'allait pas du tout, les bases de la thermodynamique n'étaient pas satisfaisantes, d'où ce deuxième petit nuage.

Et en fait, ces petits nuages n'étaient pas si petits que cela. Le premier petit nuage était donc le problème de l'éther, vous savez qu'il a été résolu par Einstein en 1905, et qu'il a donné naissance à toute la relativité, et donc à l'énergie nucléaire et à toutes les conséquences qui ont suivi. Ce qui était caché derrière le second petit nuage, l'équipartition de l'énergie, n'était rien moins que la mécanique quantique, et ces deux problèmes contenaient donc en fait toute la physique du 20ème siècle. Les deux personnes qui se sont attaquées aux petits nuages sont d'abord Max Planck en 1900, qui essayait de comprendre le problème, « je chauffe un truc, je calcule l'énergie émise, cette énergie est infinie, il y a quelque chose qui ne va pas ». Donc il fallait trouver autre chose, et Planck a fait une espèce de petit calcul un peu compliqué et pas très clair, qui disait que tout se passait bien mais à condition de mettre quelque part des grains d'énergie. En d'autres termes, il fallait « granulariser » l'énergie, et si on suppose que l'énergie des atomes ou des molécules qui oscillent ne varie pas continûment mais varie par sauts, alors tout se passe bien dans le sens où l'énergie du corps chauffé n'est plus infinie, on sait la calculer et le résultat du calcul est en parfait accord avec l'expérience. C'était donc une espèce de miracle que Planck ne comprenait pas vraiment, il n'était d'ailleurs pas très content de ses calculs, mais clairement ils fonctionnaient.

Lorsque Einstein a repris ce raisonnement en 1905, il l'a poussé encore plus loin en disant que les petits grains d'énergie étaient en fait des petits grains de lumière. Dans son célèbre article sur l'interprétation heuristique des phénomènes électromagnétiques, Einstein a dit qu'il nous fallait des petits grains de lumière pour que l'hypothèse de Planck soit admissible, mais que par ailleurs il y avait une très grosse incompatibilité entre cette hypothèse de Planck et les équations de Maxwell, qui étaient ce qu'on connaissait de mieux à l'époque. Dans son article Einstein n'appelait pas ce petit grain un photon, mais un « Licht Quanten - Quantum de Lumière ». Le nom de photon est apparu un peu plus tard mais de toute façon, l'idée n'est pas passée du tout. Les scientifiques n'ont pas voulu, ils ont trouvé que ce n'était pas bien, parce que les équations de Maxwell, c'était trop bien ! Les équations de Maxwell étaient ondulatoires, il fallait donc absolument des ondes, on ne pouvait pas déraper comme cela, cacher des corpuscules dans des ondes alors qu'en fait les deux concepts sont antinomiques, logiquement incompatibles. Donc il y a eu une série d'expériences, en particulier par Millikan qui ne croyait pas du tout aux corpuscules, et qui voulait montrer qu'Einstein s'était trompé. Millikan a passé dix ans à faire ces expériences, et il a conclu qu'Einstein avait raison. Millikan et Einstein ont tous deux eu le prix Nobel pour cela, mais la petite histoire dit que Millikan ne s'est jamais vraiment remis de cette aventure.
Donc finalement l'évidence expérimentale a imposé les photons, mais les physiciens n'étaient pas toujours convaincus, il y avait visiblement quelque chose de bancal dans cette affaire. Mais alors qu'on approchait de la fin des années 20, avec des ondes qui se mettaient à ressembler à des corpuscules, une nouvelle idée fondamentale est apparue. En 1925 Louis de Broglie a en quelque sorte retourné la chaussette, en disant prenons des corpuscules, est-ce qu'on ne pourrait pas les faire ressembler à des ondes, et il a donc proposé qu'on associe une onde à un corpuscule. Quand Einstein a vu cela, il a bondi d'enthousiasme en s'exclamant c'est génial, ou du moins peut-on imaginer ainsi sa réaction. Et très rapidement il y a eu des expériences, effectuées par Davisson et Germer, qui ont montré qu'on pouvait obtenir des effets de diffraction avec des électrons. On est ainsi parvenu à une situation bizarre où la lumière aussi bien que la matière avait une nature un peu duale, et était tantôt onde tantôt corpuscule, ou ni l'un ni l'autre ou les deux à la fois, on ne savait vraiment pas, ce qui était à la fois rassurant et inquiétant. En tout cas, ce qui était clair c'est qu'au milieu des années 1920 personne n'y comprenait plus rien, et beaucoup d'idées débouchaient sur des impasses.

Mais alors à la fin des années 1920, de 1925 à 1927, la théorie quantique est apparue, les équations sont apparues, il n'y avait plus qu'à s'en servir et tout devenait simplement limpide. On ne comprenait pas bien mieux qu'avant ce qu'était un photon, mais en tout cas on savait calculer toutes ses propriétés, et on les trouvait en accord avec les expériences. Ceci a bien sûr été une énorme surprise pour les physiciens, qui se sont alors partagés en deux catégories : ceux qui appliquaient - avec un grand succès - les nouvelles équations à d'innombrables phénomènes physiques, et ceux qui tentaient désespérément de trouver une façon moins déroutante de faire co-exister les ondes et les corpuscules. Un exemple simple illustrant le problème est de supposer qu'on prend un seul atome et qu'on lui fait émettre un seul photon, alors ce photon unique est-il onde ou corpuscule ? Et cette question a-t-elle même un sens ?
En fait, les pères fondateurs de la mécanique quantique pensaient qu'une telle expérience était impossible, par exemple Schrödinger a écrit en 1952 : « Nous ne faisons jamais d'expériences avec un seul électron, un seul atome, une seule molécule. Dans des expériences de pensée, on peut parfois supposer qu'on le fait, mais cela entraîne inévitablement des conséquences ridicules ». Schrödinger voulait dire ainsi que pour lui, quand on fait des vraies expériences, on utilise toujours des myriades d'atomes, ou de photons, et dès qu'on essaye de raisonner sur un seul de ces objets, il se passe des choses très difficiles à concevoir, qu'il qualifie même de ridicules, comme des sauts quantiques, des discontinuités, des corrélations à distance... Donc il ne pensait tout simplement pas que les objets ou évènements quantiques individuels étaient observables, et c'était il n'y a pas si longtemps, en 1952, ce qui prouve encore à quel point les idées quantiques étaient réellement révolutionnaires, même pour Schrödinger lui-même....

En fait, comme je vous l'ai dit au début de cet exposé, ces expériences qui semblaient si invraisemblables à Schrödinger se font partout depuis une vingtaine d'années. Dans tous les laboratoires de physique, dans le monde entier, il est devenu très facile de « prendre » des atomes et des photons un par un. On peut alors schématiser ainsi une expérience qui aurait définitivement traumatisé Schrödinger « j'ai un pistolet et à chaque fois que j'appuie sur le déclencheur, j'émets un photon et un seul ». C'est un « pistolet à photons ». Mais cet engin est-il seulement concevable ? Et bien oui, il est même très simple à faire, et je vais vous montrer comment, mais pour cela il va nous falloir « descendre » à l'échelle des atomes.
Alors comment faire pour avoir un seul photon ? Une source lumineuse habituelle, comme ces trois projecteurs qui m'aveuglent, émet à peu près 1020-1021 photons par seconde. Cela fait beaucoup... On peut donc essayer de se mettre dans le noir, il n'y a plus que quelques photons, mais il y a un photon de temps en temps, ce qui n'est pas la même chose qu'un photon quand on appuie sur la gâchette. Alors comment faire pour réaliser ce « pistolet à photon » ? En raisonnant naïvement, on peut dire que si je veux un seul photon à la fois, je dois prendre un seul atome à la fois. Donc imaginons une expérience où j'aurais un seul atome, là sous mon microscope, sur lequel j'enverrai une impulsion laser intense, une espèce de coup de flash. On sait, si on a appris un peu de mécanique quantique, que quand on éclaire un atome, il « monte » dans un niveau d'énergie excité, Schrödinger et Bohr nous l'ont appris en calculant les niveaux de l'hydrogène. Mais par simple conservation de l'énergie, un seul atome porté dans un état excité va émettre un seul grain de lumière, dont l'énergie est égale à la différence des énergies des deux niveaux de l'atome, h nu = E2 - E1. Evidemment vous allez dire que là je triche un peu : au lieu d'avoir 1020 photons, je mets sous le microscope un échantillon qui va contenir au moins 1020 atomes, ce qui déplace simplement le problème. La vraie difficulté est maintenant de trouver comment s'y prendre pour isoler un atome et un seul sous le microscope.

En fait, il y a de nombreuses façons d'y parvenir, et parmi elles il y en a une que j'aime bien. Elle consiste à remarquer que la nature a été gentille en nous donnant le diamant, qui n'est pas seulement le meilleur ami de nos épouses, mais aussi un système physique très intéressant. Vous savez sans doute qu'un cristal de diamant est constitué presque exclusivement d'atomes de carbone, rangés régulièrement. Mais dans ce cristal, il existe des petits défauts, des imperfections, et un défaut particulièrement intéressant s'appelle le centre « NV », N pour Nitrogen (azote) et V pour Vacancy (lacune). Ce centre NV est donc formé de l'assemblage d'un atome d'azote et d'une lacune, isolés dans le diamant, et le point remarquable est que ces centres sont très rares, et sont donc bien séparés spatialement. Si on regarde un petit bout de diamant, par exemple celui-ci qui mesure 0,1 mm d'épaisseur, 1 mm de long - c'est un tout petit bout de diamant, nos femmes n'en voudraient pas - et qu'on l'éclaire, et bien il est possible d'avoir dans ce diamant des centres NV qui sont suffisamment séparés pour qu'on puisse les éclairer un par un. On peut aussi se débrouiller pour créer ces centres NV dans des petits grains de diamants, qu'on appelle des nanocristaux et qui sont plus simples à manipuler. Avec un peu de cuisine que savent faire les physico-chimistes, on peut faire en sorte que dans ce tout petit grain, qui contient quand même des myriades d'atomes de carbone, il n'y ait qu'un seul centre NV et donc qu'un seul atome émetteur.

A partir de là c'est presque gagné : on prend le petit bout de diamant que je mets ici sous le microscope, et un laser envoie des impulsions très brèves, qui vont chacune exciter l'atome unique. Une fois cet atome excité, la théorie quantique affirme qu'il va émettre un seul photon à la fois. Pour préciser les choses, les centres NV absorbent essentiellement de la lumière bleue-verte, et ils réémettent de la lumière rouge. Donc un laser bleu-vert va être bien absorbé, puis tous les photons bleu-vert du laser vont être bloqués par un filtre spectral, et la lumière rouge qui va sortir va être composée d'impulsions qui contiennent un seul photon. Sur la figure on voit ici les impulsions de laser vertes, ici ce qu'on appelle un miroir dichroïque, c'est-à-dire une miroir qui laisse passer le rouge et qui arrête complètement le vert. En sortie de ce dispositif, on doit obtenir pour chaque impulsion un photon rouge et un seul. En fait on n'aura peut-être pas un photon pour chaque impulsion, car le photon émis peut partir dans d'autres directions, mais on est certain d'avoir au plus un photon dans chaque impulsion : l'unicité du photon est garantie par l'unicité de l'atome émetteur. En pratique, un laser focalisé crée un petit point lumineux qu'on peut déplacer à la surface du morceau de diamant, et on essaie de trouver des endroits où il y a un atome émetteur. Sur cette zone qui fait 5 microns par 5 microns, on voit un point brillant qui semble énorme, mais c'est simplement un seul atome qui émet des photons un par un. Si on coupe suivant ce trait, on voit qu'il y a beaucoup de lumière émise à l'endroit où il y a l'atome d'azote, et très peu de lumière émise à côté. Ce fond bleu est dû à la lumière émise par les myriades d'atomes de carbone autour du centre NV, et le miracle est que ces atomes n'émettent pratiquement rien, presque toute la lumière qu'on voit est émise par le centre NV. C'est un peu comme un petit bateau sur la mer, quand on voit de très loin un point brillant sans savoir ce que c'est, si on regarde la mer on pense que c'est un bateau, et si on regarde notre échantillon sous son microscope, on pense que c'est un seul atome qui émet des photons un par un. Une question un peu plus technique est de savoir comment on le prouve, c'est-à-dire, comment être sûr que les photons sortent vraiment un par un ?
Je vais donc essayer de l'expliquer, c'est un peu plus délicat mais allons-y. Imaginons donc qu'on a un train d'impulsions lumineuses qui arrivent une par une, et que l'on veuille savoir si dans chacune de ces impulsions il y a un ou plusieurs photons. Ces petites impulsions sont dessinées ici, et pour savoir si elles contiennent un ou plusieurs photons, on va les couper en deux sur un miroir semi-réfléchissant, c'est-à-dire qu'une partie de la lumière va être transmise et une autre partie de la lumière va être réfléchie. Derrière la lame on place ce qu'on appelle des compteurs de photons, ce sont des photodiodes à avalanche qui produisent des impulsions électriques - des « clics » - quand un photon arrive. Donc on peut avoir un clic d'un côté, ou un clic de l'autre côté. Mais s'il n'y a qu'un seul photon dans l'impulsion, clairement on ne peut pas avoir deux clics dans la même impulsion, c'est-à-dire que le photon ne se va pas se couper en deux, il va aller d'un côté ou de l'autre faire un clic ici ou là. Par contre, si l'impulsion contient plusieurs photons, alors je peux avoir deux clics produits par la même impulsion. On voit peut-être un peu mieux ce qui se passe sur ces figures : pour des impulsions lumineuses ordinaires, qui sont en fait des impulsions lasers qui contiennent 0 ou 1 ou 2 ou davantage de photons, on voit apparaître des pics qui correspondent à un photon détecté d'un côté de la lame et un autre photon de l'autre côté, séparés par le temps t indiqué sur l'axe horizontal. Donc un pic en t = 0 veut dire un clic d'un côté et un autre clic de l'autre côté de la lame, se produisant ensemble avec un délai nul : ce sont donc deux photons dans la même impulsion. Pour un pic décalé sur le côté, un photon est arrivé à un certain instant, et un autre photon est arrivé de l'autre côté de la lame 100 ns plus tard. Puisqu'on voit des pics régulièrement espacés, on peut avoir 2 photons dans la même impulsions ou deux photons dans deux impulsions séparées, ces évènements ont exactement la même probabilité. On conclut alors que ces impulsions sont des impulsions « ordinaires », qui peuvent très bien contenir deux photons. Par contre, si je remplace ces impulsions lasers par des impulsions émises par le centre NV unique, une différence frappante apparaît : à délai nul, t = 0, il n'y a plus de pic, ce qui confirme qu'il est impossible de compter deux photons dans une impulsion qui n'en contient qu'un seul. On observe donc un effet spectaculaire, qui est la disparition du pic central, ce qui fournit une preuve expérimentale directe que les photons arrivent bien un par un. On peut aussi montrer mathématiquement que si on utilise seulement les équations de Maxwell ondulatoires, sans mécanique quantique, cet effet semble impossible, car l'onde devrait se partager et donc forcément créer des doubles clics. L'absence de double clic veut dire que l'énergie est allée complètement d'un côté ou complètement de l'autre, ce qui est incompatible avec la notion d'une onde qui se partage, mais est parfaitement compatible avec un comportement corpusculaire. Dans cette expérience simple, qui tient sur une table, on voit donc que le photon se comporte comme un corpuscule, il choisit son chemin et ne se partage pas en deux sur la lame séparatrice.

Mais à ce stade, nous devons nous souvenir que le photon est un objet quantique, et donc que son comportement n'est pas du tout celui d'une boule de billard. Pour s'en convaincre, considérons ce dispositif qui s'appelle un « biprisme de Fresnel » : ces deux prismes partagent le faisceau en deux parties, qui sont déviées l'une vers le haut, et l'autre vers le bas. Ces deux fractions du faisceau atteignent ensuite deux photodiodes à avalanche, et on envoie dans le dispositif des impulsions à un seul photon. Comme tout à l'heure chaque photon ne peut être détecté qu'une seule fois, et donc on ne détecte rien dans le pic central, on le voit ici en temps réel, avec de vrais photons qui arrivent un par un. On peut en conclure que le biprisme se comporte comme une espèce d'aiguillage, chaque photon qui arrive va soit à droite, soit à gauche, mais il ne produit jamais de double clic. Mais où sont alors passées les propriétés « ondulatoire » du photon ? Pour les observer il suffit en fait d'aller regarder dans la zone où les faisceaux se recouvrent, et où classiquement on aurait des interférences. On peut donc imaginer l'expérience suivante : j'approche un détecteur, qui cette fois ci est une caméra, et je regarde dans la zone de recouvrement, avec toujours les photons qui arrivent un par un. Comme j'ai dit que les photons vont d'un côté ou de l'autre, on pourrait s'attendre à voir des clics uniformément répartis, correspondant à des photons venant tantôt du haut, tantôt du bas. Donc on lance une accumulation, on voit bien des petits points qui arrivent un par un, et on attend. Et là - surprise ? - on voit qu'en attendant suffisamment longtemps les petits points s'arrangent régulièrement sur des franges d'interférence, qui sont des franges d'interférence à un seul photon. Ce que je vous ai dit n'était donc pas tout à fait correct : le photon, qui précédemment choisissait d'aller d'un côté ou de l'autre, a changé de comportement, parce que dans un phénomène d'interférence il y a forcément deux amplitudes qui interférent, et qui proviennent des deux côtés à la fois. Donc, comme les fondateurs de la physique quantique dans les années 1920, on ne sait plus vraiment ce qu'est notre photon : dans la deuxième expérience, il se comporte comme se comporterait une onde, alors que dans la première il se comporte d'une façon « corpusculaire », incompatible avec un comportement ondulatoire. Alors qu'est ce que le photon ? En fait, le photon n'est ni une onde, ni un corpuscule, c'est un objet quantique, dont le comportement est parfaitement bien décrit par la théorie quantique. Et ces expériences montrent que le photon a des propriétés subtiles, et qu'il faut se garder de raisonnements trop naïfs. Dire que le photon est une onde ou un corpuscule conduit forcément à une contradiction, avec l'une ou l'autre des deux expériences que nous venons de voir. La seule façon de s'en sortir, et c'est comme cela que les physiciens s'en sont sortis, c'est finalement d'utiliser la théorie quantique, sans poser trop de questions sur la « nature ultime » des objets qu'elle manipule.
Ces discussions sont bien connues de tous ceux qui ont étudié la mécanique quantique, et en fait on a changé de siècle depuis toutes ces histoires. Et un nouveau point de vue, apparu à la fin du 20ème siècle, est de se demander si on ne pourrait pas utiliser le photon en particulier, et toutes ces propriétés quantiques bizarres en général, pour faire des choses intéressantes, amusantes et peut-être même utiles. Il serait particulièrement intéressant de trouver de nouvelles méthodes pour transmettre et traiter l'information, car la lumière est un vecteur d'informations, on sait que les télécommunications optiques utilisent l'information codée sur des impulsions lumineuses. Et si ces impulsions lumineuses sont de nature quantique, ne pourrait-on pas faire avec elles des choses impossibles à réaliser en physique classique ? Cette direction de recherche s'appelle l'information quantique, et elle a stimulé un grand nombre de travaux théoriques et expérimentaux. Et comme je vais vous le montrer, ces idées fournissent une illustration directe des propriétés « paradoxales » du photon.
En fait, deux grandes applications sont très étudiées en ce moment. La première s'appelle la cryptographie quantique, et son but est d'utiliser les propriétés du photon pour échanger des messages secrets. Actuellement, les messages secrets sont devenus l'affaire de tous, pensez seulement à la protection des données que vous échangez couramment sur internet. Alors, est-ce qu'il n'y aurait pas moyens d'utiliser les lois de la physique pour garantir la confidentialité d'un secret ? Une deuxième idée serait d'utiliser les photons et les atomes directement en tant que nano-objets quantiques, et d'essayer de leur faire traiter l'information, c'est-à-dire de faire un « ordinateur quantique » qui fonctionnerait avec des atomes individuels. En 1994, un informaticien nommé Peter Shor a montré que cet ordinateur quantique, si on savait le fabriquer, pourrait résoudre certains problèmes exponentiellement plus vite qu'un ordinateur classique. En pratique, cela veut dire que certains calculs qui prendraient des millions d'années sur un ordinateur classique pourraient être fait en quelques jours ou semaines. Mais bien sûr, cela suppose qu'on est capable de construire cet ordinateur quantique, je vous en dirai un petit mot tout à l'heure, et vous verrez que c'est loin d'être évident. Le point important à retenir est que conceptuellement, il y a des ressources cachées dans le formalisme quantique, et c'est ce que je voudrais essayer de vous expliquer plus en détail maintenant.

Nous allons donc commencer par la cryptographie, avec le petit folklore habituel de ce sujet : on considère deux personnes, Alice et Bob, qui veulent échanger un message secret, sans que l'espion Eve puisse l'intercepter. Il y a bien sûr énormément à dire sur ce sujet, mais je vais beaucoup raccourcir en me concentrant sur la question suivante : existe-t-il un code secret rigoureusement inviolable, pour lequel on puisse démontrer mathématiquement que toute tentative de l'espion est vouée à l'échec ? En fait ce code existe, et il est même tout à fait classique, mais évidemment il repose sur certaines hypothèses. Il a été proposé par Gilbert Vernam au début du 20ème siècle, et il utilise un canal secret, c'est-à-dire qu'on suppose qu'Alice et Bob, avant de transmettre le message lui-même, ont déjà échangé ce qu'on appelle une clef secrète. Une clef secrète n'est pas un message, mais une suite de bits aléatoires qui ne veulent absolument rien dire, mais qui ont le mérite essentiel d'être connus uniquement d'Alice et de Bob. S'ils disposent de cette clé, Alice et Bob peuvent échanger des messages de façon parfaitement confidentielle. Il faut pour cela faire une addition modulo deux, qui est aussi un « ou exclusif », entre chaque bit de clé et chaque bit du message. On obtient ainsi le message crypté, qui peut être envoyé publiquement par téléphone, Internet, ou tout autre canal de communication disponible. Bob reçoit ce message crypté, et pour le déchiffrer il fait à nouveau une addition bit à bit modulo deux, et reconstitue ainsi le message envoyé par Alice. Claude Shannon, le fondateur de la théorie de l'information, a montré à la fin des années 1940 que cette méthode de cryptage est rigoureusement inviolable, moyennant les hypothèses suivantes. Tout d'abord, la clé doit être complètement aléatoire, c'est-à-dire que chacun de ses bits doit être lui-même aléatoire, et indépendant des autres bits. De plus, la clé doit être aussi longue que le message, pour pouvoir faire une addition bit à bit. Autre contrainte, elle doit être utilisée une seule fois. Si vous l'utilisez plusieurs fois, on peut constater facilement que deux messages codés avec la même clé sont très faciles à décrypter, simplement en les ajoutant bit à bit. Donc ce code est très intéressant, et la seule voie d'attaque disponible pour l'espion est en fait de s'attaquer au canal secret, c'est-à-dire de tenter de s'emparer de la clé. En pratique, la clé est transportée par un messager, par exemple sur un CD enfermé dans une valise piégée. Mais cette méthode demeure risquée et potentiellement vulnérable, on peut acheter l'espion, le séduire, le pervertir, le corrompre, alors qu'Alice et Bob voudraient que leur canal secret soit vraiment secret. L'enjeu devient donc : serait-il possible de remplacer le canal secret du code de Vernam par un canal quantique, dont la sécurité soit garantie par la mécanique quantique ? On pourrait alors utiliser la sécurité mathématique du code de Vernam, combinée avec un canal quantique qui fournit une clé aussi longue que le message, dont la sécurité est garantie par les lois de la physique. C'est cela qu'on appelle la cryptographie quantique, qui était initialement un enjeu intellectuel, mais on verra qu'elle devient actuellement aussi un enjeu pratique.

Alors comment faire ? On va utiliser des photons, je vous en ai déjà parlé, mais comment coder de l'information sur des photons ? Le photon est caractérisé par sa direction de propagation, sa fréquence ou longueur d'onde du rayonnement associé, et une autre propriété très utile, sa polarisation. Fresnel avait déjà montré que la lumière est une vibration transverse, c'est-à-dire qu'elle vibre perpendiculairement à sa direction de propagation, en fait dans un plan perpendiculaire à cette direction de propagation. Voici un petit dessin, qui représente un photon se propageant dans cette direction. Je peux décider que le bit vaut « 1 » si la polarisation du photon est verticale, et que le bit vaut « 0 » si la polarisation est horizontale. On dispose dans les laboratoires d'instruments qu'on appelle polariseurs, qui ont la vertu de séparer les photons en fonction de leur polarisation. Le photon polarisé vertical sera toujours réfléchi et le photon polarisé horizontal sera toujours transmis. Donc si Alice code un « 0 », Bob obtient un clic de ce côté-ci, et il en déduit bien que c'est un 0 qui a été envoyé. S'il obtient un clic là, il en déduit que c'est un 1 qui a été envoyé. On a ainsi une méthode un peu compliquée mais déterministe pour envoyer des 1 et des 0, c'est-à-dire pour échanger des bits entre Alice et Bob. Mais où est la magie quantique là-dedans ? Pour l'instant, on a choisi deux directions perpendiculaires qui sont exclusives l'une de l'autre, c'est soit comme ceci, soit comme cela, la porte est soit ouverte soit fermée. Mais plutôt que de prendre ces deux directions, je pourrais prendre ces deux-là, penchées de 45° à droite ou de 45° à gauche, qui sont aussi mutuellement exclusives. Je pourrais aussi décider qu'une de ces directions correspond au bit « 1 », et la direction perpendiculaire au bit « 0 ». Et si on envoie ce codage qui semble légitime sur le polariseur, que dit la mécanique quantique ? En fait elle dit qu'on ne peut plus rien dire, car le photon qui arrive polarisé à 45° peut être transmis ou réfléchi avec des probabilités identiques, et il est impossible de prédire le résultat. Et c'est vraiment impossible dans le sens où, suivant des phrases célèbres d'Einstein et de Bohr, Dieu lui-même ne peut pas le savoir, car si on pouvait le savoir tout le formalisme quantique s'écroulerait. Cette impossibilité est reliée aux principes de Heisenberg, qui dit que si une certaine grandeur a une valeur bien définie, alors la valeur d'une autre grandeur ne peut pas être définie. Et dans cette expérience-là, la physique interdit qu'on puisse prédire le résultat, ou si on préfère impose au résultat d'être complètement aléatoire. Cet aléatoire ne se réduit pas à une ignorance, c'est-à-dire qu'il ne peut pas y avoir non plus des « variables cachées » qui donneraient le résultat sans qu'on le sache. En effet il a été prouvé que de telles variables cachées sont impossibles, car incompatibles avec la mécanique quantique.
Alors, l'information codée sur ces polarisations à 45° est-elle définitivement perdue ? Eh bien non, on peut quand même la récupérer, il suffit pour cela de tourner le polariseur. En effet, si on aligne le polariseur avec les directions choisies pour la polarisation du photon, on récupère le 0 et le 1, à nouveau de façon déterministe. Le point fondamental est donc que si on code l'information d'une certaine façon, il faut absolument la lire de la même façon. Si on la lit comme on l'a codé, « tout baigne », si on la lit dans d'autres directions, on a tout simplement n'importe quoi. Et ce n'importe quoi n'a pas d'issue, dans le sens où, si on connaît la polarisation du photon dans une base, il est intrinsèquement impossible de la connaître dans l'autre. C'est à partir de cette idée que l'on peut faire fait de la cryptographie quantique, comme je vais l'expliquer maintenant. Alice va envoyer à Bob des photons polarisés, en choisissant ce que j'appelle une base, c'est-à-dire soit les deux directions horizontales-verticales (h-v), soient les deux directions 45°-135°. Elle peut décider que la direction verticale correspond au bit 1, elle envoie le photon à Bob, Bob l'analyse comme il faut et il récupère le 1, c'est parfait. Là, elle a aussi envoyé un 1, mais Bob a utilisé la mauvaise base. En effet, Bob ne connaît pas à l'avance la base utilisée par Alice, donc il choisit une base au hasard, et là il s'est trompé, pas de chance, et son résultat est alors complètement aléatoire. Là, cela marche à nouveau, Alice avait utilisé cette base, Bob aussi, il a bien récupéré un 0. On constate donc que c'est une façon un peu pénible de transmettre des bits portés par des photons polarisés. On voit aussi que dans la moitié des cas, Bob obtient un résultat qui n'a aucun sens. Que peut-il faire pour se débarrasser des situations où il a mal choisi ? L'astuce est la suivante : lorsqu'il a reçu les photons, c'est-à-dire lorsqu'ils sont arrivés, qu'ils sont enregistrés dans sa machine, il téléphone à Alice et lui dit ici j'ai utilisé la base h-v, ici la base 45°-135°. Et Alice lui indique si son choix a été le bon ou pas. Ici par exemple elle dit que ce n'était pas la bonne base, donc Bob élimine ce photon. Ici, Alice répond oui, c'était la bonne base, Bob garde le photon et bien sûr dans ce cas-là obtient le bit qu'avait envoyé Alice. On élimine donc le caractère aléatoire de la mesure en effectuant un tri a posteriori. Ceci permet de construire un ensemble de bits échangés, qui sont identiques si tout s'est bien passé pour Alice et Bob.
C'est une façon bien laborieuse d'échanger des bits, mais l'intérêt de la méthode va apparaître en examinant ce qui se passe si on a un espion sur la ligne. Cet espion va essayer de détecter la polarisation envoyée par Alice sans arrêter le photon, pour passer inaperçu. Par exemple ici, il peut mettre un polariseur comme cela, récupérer un 1, et renvoyer ce photon polarisé à 45° pour tromper Bob. Mais comme Bob n'utilise pas la même base qu'Alice, ils vont éliminer ce photon, et l'effort d'Eve n'aura servi à rien. Dans le cas suivant, l'espion détecte un photon polarisé horizontalement, il le renvoie à Bob, qui cette fois utilise la même base qu'Alice, et obtient un photon polarisé verticalement. Alors là il s'est passé quelque chose : Alice avait envoyé un 0, Bob a utilisé la bonne base, et néanmoins le photon détecté n'est pas le bon. L'intervention de l'espion a donc créé une erreur de transmission. En examinant un à un les différents cas, je ne vais pas en faire la liste complète, on peut se convaincre facilement que les interventions de l'espion vont forcément créer des erreurs. Ces erreurs vont alors permettre à Alice et Bob de détecter la présence de l'espion.

A ce stade du raisonnement, l'auditoire est généralement perdu, donc permettez- moi d'anticiper quelques questions que vous vous posez probablement. Première question : si Bob révèle sa base de mesure, pourquoi l'espion ne peut-il pas simplement écouter cette révélation, et en savoir autant que Bob à la fin ? Cette question est fondamentale, et il faut bien comprendre la réponse : si elle veut savoir quelque chose, Eve doit faire quelque chose au moment où le photon passe, et à ce moment le photon n'est pas encore arrivé chez Bob, donc il n'a pas encore annoncé sa base. En fait, l'information de base arrive trop tard pour être utile à l'espion, elle arrive quand le photon n'est plus là, et l'espion ne peut rien faire d'efficace. En d'autres termes, si je vous envoie un photon polarisé, il vous est impossible de deviner la polarisation parmi les quatre (h-v-45°-135°) que je peux vous envoyer. Et la mécanique quantique permet de démontrer que plus Eve va augmenter son information, plus elle va créer d'erreurs dans les photons transmis. Elle peut tout savoir, mais alors elle va créer énormément d'erreurs, ou elle peut ne créer aucune erreur, mais alors elle ne saura rien du tout. Donc la réponse à la première question est que Bob a un avantage sur Eve, parce qu'il révèle sa base après avoir lui-même reçu le photon, et qu'au moment où le photon passe, Eve ne connaît pas la base et ne peut rien faire d'efficace. Deuxième question : si tout repose sur une évaluation des erreurs, comment Alice et Bob évaluent-ils les erreurs de transmission ? La réponse est qu'ils échangent d'abord un grand nombre de photons, puis effectuent un sondage sur les données qu'ils ont reçues. En pratique, ils vont choisir au hasard une petite fraction des photons reçus et comparer les résultats, à nouveau Eve peut écouter leur conversation une fois que les photons ont tous été reçus par Bob. Ce que font Alice et Bob ressemble donc à un sondage « sorti des urnes » que l'on fait pour les élections, cela donne une estimation très fiable du taux d'erreurs, qui va les renseigner sur la quantité d'information connue par Eve. Troisième et dernière question : si on effectue une transmission réelle, il y aura certainement toujours quelques erreurs, même s'il n'y a pas d'espion sur la ligne. Comment procède-t-on alors ? Et si Eve est bien là, comment Alice et Bob vont-ils utiliser leur clé secrète, si elle contient des erreurs et qu'elle est partiellement connue d'Eve ? La réponse est qu'avant d'utiliser leur clé, Alice et Bob vont traiter leurs données, c'est-à-dire qu'ils vont appliquer des algorithmes classiques, que je ne vais pas détailler, qui font en sorte que la clé finale, celle qu'ils vont utiliser, est toujours sans erreur et parfaitement sûre. Mais alors, quel est l'effet des erreurs provoquées par Eve ? En fait, les erreurs, qu'elles soient ou non dues à Eve, ont pour effet de diminuer la taille de la clé secrète. S'il n'y a aucune erreur tous les bits sont bons, et la taille de la clé est simplement égale au nombre de bits reçus par Bob. Plus il y a d'erreurs, plus la clé est petite, et finalement quand il y a beaucoup d'erreurs, en pratique plus de 11 % d'erreurs, il n'y a plus de clé du tout. Donc après avoir appliqué ce traitement des données que je ne détaille pas davantage, Alice et Bob obtiennent dans tous les cas une clé parfaitement sûre et sans erreur. Le point central est de pouvoir évaluer ce que connaît Eve en évaluant les erreurs, et la clé est d'autant plus petite qu'il y a davantage d'erreurs, mais si la clé existe elle est parfaitement secrète et ne contient aucune erreur.

En conclusion, la cryptographie quantique permet en principe d'échanger des clés secrètes, avec une sécurité aussi grande que la confiance qu'on accorde à la mécanique quantique. C'est donc une idée très séduisante, mais comment la faire fonctionner en pratique ? De nombreux travaux ont été réalisés depuis quelques années pour répondre à cette question, et des dispositifs ont été construits et sont même maintenant commercialisés, par exemple par une société genevoise qui s'appelle idQuantique. Dans ce cas les photons sont envoyés dans des fibres optiques, mais il y a eu aussi des échanges en espace libre, par exemple entre deux sommets séparés de 23 Km et situés en Allemagne, sur le Zugspitze. On voit ici le principe du dispositif, les photons polarisés sont envoyés dans un petit télescope comme ceux que vous utilisez quand vous faites de l'astronomie amateur. On voit ici le récepteur de Bob, avec des polariseurs et des compteurs de photons qui analysent une polarisation parmi quatre, suivant le protocole que j'ai présenté. L'objectif à terme de ces expériences en espace libre est de distribuer des clés secrètes à partir d'un satellite en orbite basse. Voici maintenant une autre expérience qu'on a fait à Orsay, en utilisant la source que j'ai déjà présentée, qui émet vraiment des photons un par un. Ces photons sont ensuite codés en polarisation, et si vous regardez bien ici, vous voyez qu'on envoie les photons par la fenêtre, pour échanger la clé secrète entre deux bâtiments. Voici un exemple de résultat : on obtient tout d'abord des chaînes de bits avec des erreurs, puis on mesure le taux d'erreurs, je vous l'ai expliqué, ensuite on corrige ces erreurs avec les algorithmes dont j'ai parlé aussi, et finalement on réduit la taille de la clé pour qu'elle soit complètement inconnue d'Eve. Ce système peut produire 16000 bits secrets par seconde, ce n'est pas beaucoup mais c'est vraiment secret, garanti quantique.

Quelles sont les perspectives commerciales de ces dispositifs ? Actuellement, la compagnie Id quantique à Genève, et la compagnie MagiQ Technologies aux Etats-Unis, vendent des systèmes complets de distribution de clé via des fibres optiques. La portée est de quelques dizaines de kilomètres, et le débit de quelques milliers de bits secrets par seconde. Il y a aussi beaucoup d'activités de recherche dans ce domaine, en Europe et aux Etats-Unis. Actuellement ces systèmes fonctionnent assez bien, mais ils imposent des contraintes d'utilisation assez déroutantes par rapport aux méthodes de cryptage actuelles, qui sont essentiellement basées sur des logiciels. Il n'est donc pas encore vraiment clair que la cryptographie quantique ait vraiment un avantage compétitif, mais il est clair qu'elle a déjà éliminé beaucoup de difficultés qu'on croyait insurmontables au départ. D'ici quelques années, je pense qu'on pourra dire si la cryptographie quantique peut jouer un rôle dans le cadre des télécommunications grand public, ou si elle ne peut intéresser que quelques utilisateurs très riches, et très avides de sécurité.
Pour terminer, je voudrais dire quelques mots de ce qu'on appelle le calcul quantique, c'est-à-dire de l'idée que les objets quantiques pourraient non seulement être utilisés pour transmettre des messages secrets, mais aussi pour effectuer des calculs. Dans ce contexte, un concept très utile est le bit quantique, ou qubit. Qu'est-ce donc qu'un qubit ? Et tout d'abord, qu'est ce qu'un bit classique ? C'est un système à deux états, qu'on appelle usuellement « 0 » et « 1 ». Un bit quantique, c'est a priori la même chose, 0 et 1 aussi, mais en mécanique quantique on a vu qu'on peut faire des combinaisons linéaires d'états, qui sont aussi des interférences. Voyons un exemple, qui montrera que vous avez déjà vu des qubits sans le savoir, en considérant à nouveau un photon polarisé. On peut associer le bit « 0 » à la polarisation horizontale, et le bit « 1 » à la polarisation verticale. Qu'est-ce alors qu'une combinaison linéaire de 0 et de 1 ? C'est en fait exactement ce dont je parlais tout à l'heure, puisque la polarisation à 45° correspond à la combinaison linéaire 0+1, et la polarisation à 135° à la combinaison linéaire 0-1. Donc un photon est un qubit, c'est même un excellent qubit, et c'est ce qui fait le succès de la cryptographie quantique. Les propriétés du qubit correspondent physiquement au fait que le photon peut être dans deux états mutuellement exclusifs, mais que ces deux états peuvent interférer. Cela semble presque trop simple, mais c'est exactement la base de la physique du qubit, telle que nous l'avons utilisée pour faire de la cryptographie quantique.

Mais pour faire des calculs, il manque encore un point très important, qui est qu'il faut utiliser un grand nombre de qubits. Ceci a des conséquences cruciales que je voudrais souligner maintenant. Considérons donc un registre, un ensemble de qubits, en supposant par exemple que chaque qubit est un photon dont la polarisation peut tourner. Si on raisonne naïvement, on peut alors définir l'état de chaque photon par l'angle dont la polarisation a tourné, je vais appeler cela un « bit continu » plutôt qu'un qubit. On a donc N variables continues, qui définissent une espèce d'ordinateur bizarre où chacun des bits peut prendre une valeur continue, disons comprise entre 0 et 1. Est-ce donc cela un ordinateur quantique ? Eh bien non.

 
 
 
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