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RADIO-IMMUNOLOGIE

 

radio-immunologie

Technique de laboratoire utilisant des composés radioactifs (radio-analyse) conjugués à des antigènes pour doser des anticorps, ou, inversement, conjugués à des anticorps pour doser des antigènes.
   Initialement développée pour doser les hormones circulantes, la radio-immunologie est utilisée pour dépister les anticorps présents dans le sang d'un malade lors d'une maladie telle que le lupus érythémateux disséminé ou lors d'une allergie. Inversement, elle sert à doser une substance (médicament, marqueur de tumeur, vitamine, etc.) à l'aide d'un anticorps marqué, élaboré spécifiquement à cette fin.
   Le principe du test de Farr consiste à fixer un isotope radioactif (A.D.N. contenant un fragment radioactif) sur un antigène et à mêler cet antigène marqué au sérum du malade censé contenir des anticorps dirigés contre l'A.D.N. Après formation des complexes immuns (anticorps et antigène cible), la radioactivité mesurée indique la quantité d'anticorps présents. Par une technique analogue, il est possible de doser les immunoglobulines de type E soit dans leur ensemble, soit en distinguant celles qui sont spécifiques d'un allergène chez un malade allergique. La technique immunoenzymologique ELISA a largement supplanté la radio-immunologie.
radio-isotope

radioélément
radioactivité

Émission de rayonnements par les noyaux de certains atomes d'un élément chimique, conduisant à la transformation, ou transmutation, de cet élément en un autre.
   La radioactivité est une propriété des corps dont les atomes sont instables du fait d'un déséquilibre entre le nombre de protons (particules lourdes de charge électrique positive) et le nombre de neutrons (particules lourdes de charge nulle) de leur noyau. Celui-ci tend à revenir à la stabilité en libérant de l'énergie. La radioactivité peut être naturelle ou résulter d'une activation des noyaux atomiques par un apport extérieur d'énergie (radioactivité artificielle).
DIFFÉRENTS TYPES DE RAYONNEMENT
Il en existe trois.
— Les rayons alpha sont constitués de particules formées de deux protons et de deux neutrons. Longtemps récusée, leur application à la radiothérapie localisée est maintenant envisagée.
— Les rayons bêta sont constitués d'électrons (particules légères de charge négative) ou de positons (particules analogues aux électrons, mais de charge positive). Ils sont utilisés pour doser en laboratoire certaines molécules biologiques telles que des hormones au moyen de marqueurs radioactifs (radio-immunologie) ; ils sont également utilisés dans les traitements par des médicaments radioactifs (radiothérapie métabolique) ainsi qu'en imagerie médicale (tomographie à positons).
— Les rayons X et gamma sont de nature électromagnétique, comme la lumière visible. Ils sont utilisés en imagerie médicale (scintigraphie, etc.) et en cobaltothérapie (traitement par le cobalt radioactif).
MESURE
L'activité d'une source de rayonnement est mesurée en becquerels (Bq). Cette unité, valable à l'échelle atomique (elle correspond à une désintégration par seconde), n'est pas adaptée à l'évaluation d'un risque pour l'homme. La quantité de rayonnements reçue par un organisme (dose absorbée) se mesure en grays (Gy). Mais l'effet de ces rayonnements sur un organisme dépend aussi de leurs caractéristiques : la notion d'équivalent de dose, mesurée en sieverts (Sv), permet à la fois de prendre en compte ces données quantitatives et qualitatives. Le gray et le sievert ont remplacé des unités plus anciennes comme le rad (100 rads = 1 gray) et le rem (100 rems = 1 sievert).
   Les normes de protection contre les rayonnements ont pour but de limiter leurs risques et de les maintenir à un taux comparable à celui que comporte toute activité humaine. Elles doivent tenir compte du niveau de radioactivité naturelle de l'environnement. Ainsi, en France, le rayonnement cosmique (venant du ciel) et tellurique (venant du sol) correspond à une dose de 2,4 millisieverts par an. À titre d'exemple, l'accident de Tchernobyl d'avril 1986 a augmenté cette dose annuelle de 0,07 millisievert pour la population française (source O.N.U.), ce qui est inférieur à la dose reçue lors d'un cliché radiologique. Les directives Euratom du Conseil de l'Union européenne fixent la dose annuelle admissible pour le public à 1 millisievert pour les irradiations d'origine non naturelle (industries nucléaires, hors domaine médical) et à 20 millisieverts pour le personnel exposé dans un cadre professionnel.
EFFETS DES RAYONNEMENTS
Du fait de leur énergie, les rayonnements radioactifs sont susceptibles d'exercer une action néfaste sur l'organisme. Les rayons alpha et bêta sont peu pénétrants et ne sont dangereux que s'ils sont introduits, par exemple, par ingestion de produits alimentaires contaminés. Les rayons gamma, en revanche, pénètrent profondément et peuvent traverser les organes (irradiation).
   Les effets des rayonnements sont de deux types : ceux qui affectent directement l'être vivant et ceux qui atteignent sa descendance. Tous ces effets varient selon la dose reçue, la durée de l'exposition et l'étendue de la région exposée au rayonnement. Les effets de doses importantes sont bien connus quand celles-ci sont reçues en une seule fois par le corps entier. À l'inverse, l'effet de petites doses est plus difficile à évaluer.
— Les effets précoces surviennent dans les heures, les jours ou les semaines qui suivent l'exposition à de fortes doses. À partir d'une dose de 0,2 sievert, les premières atteintes des rayonnements portent sur les cellules sanguines, surtout les globules blancs (infections) et les plaquettes (hémorragies). De 1 à 2 sieverts, on observe une radiodermite (rougeur de la peau). De 3 à 5 sieverts apparaissent des troubles digestifs (nausées, vomissements). Pour des doses plus importantes viennent s'ajouter des brûlures étendues et des troubles nerveux (paralysies).
— Les effets tardifs ne sont décelables que pour des doses au moins égales à 1 sievert et après un délai moyen de 4 ans pour les leucémies, de 10 ans pour les autres cancers. Si le risque de développer un cancer est accru, la survenue de celui-ci n'est pas inéluctable. Pour des doses plus faibles, comprises entre 0,1 et 1 sievert, les cancers provoqués par des rayonnements sont plus exceptionnels, survenant surtout chez des enfants dont la mère a été irradiée pendant la grossesse. L'autre conséquence de l'irradiation d'un fœtus est le risque de survenue d'une malformation. L'effet de doses inférieures à 0,1 sievert ne s'est pas révélé significatif, comparé à la fréquence naturelle des malformations chez l'homme. Des irradiations plus importantes peuvent amener à proposer une interruption de grossesse, et cela d'autant plus que la grossesse en est à son début. Un autre effet tardif des rayonnements est la survenue d'une cataracte (opacification du cristallin de l'œil) pour des doses locales supérieures à 1 sievert.
   L'uranium appauvri, présent dans de nombreux produits chimiques et dans certains obus, est composé de l'isotope 238, le moins radioactif des 3 isotopes qui composent l'uranium naturel. Il pourrait s'accumuler dans les reins. Utilisé pendant le conflit du Kosovo (1999), il a été accusé d'être responsable de l'apparition de cancers ou de leucémies, ce qui n'est pas démontré.
— Les effets sur la descendance ont été décrits chez certains animaux (mutations) ; en revanche, aucune modification transmissible des gènes n'a été observée dans la descendance des populations irradiées d'Hiroshima ou de Nagasaki.
PROTECTION
Quatre grands principes doivent être observés dans la protection contre la radioactivité : s'éloigner autant que possible de la source radioactive ; réduire le temps de séjour à proximité ; utiliser des écrans de protection (en plomb ou en béton contre les rayonnements gamma) ; s'efforcer d'éviter toute absorption accidentelle. L'utilisation de sources radioactives fait l'objet de mesures légales et réglementaires très strictes.

 

 DOCUMENT   larousse.fr    LIEN

 
 
 
 

LE VENTRE, NOTRE DEUXIÈME CERVEAU

 


Le ventre, notre deuxième cerveau


L’interaction cerveau-intestin
Greffe de matière fécale ou médicament ?
Des probiotiques pour traiter l'autisme ?
Microbiote et médecine personnalisée
Interview avec Giulia Enders

L'intelligence du ventre
Le ventre en quelques chiffres
Guérir des maladies mentales en soignant l'intestin ?
Le microbiote, un trésor intestinal

LE VENTRE, NOTRE DEUXIÈME CERVEAU
Dernière mise à jour: 04 Septembre 2015
Que savons-nous de notre ventre, cet organe bourré de neurones que les chercheurs commencent à peine à explorer ? Il semblerait que notre cerveau ne soit pas le seul maître à bord.
LE VENTRE, NOTRE DEUXIÈME CERVEAU


Il y a quelques années, les scientifiques ont découvert en nous l’existence d’un deuxième cerveau. Notre ventre contient en effet deux cents millions de neurones qui veillent à notre digestion et échangent des informations avec notre "tête". Les chercheurs commencent à peine à décrypter cette conversation secrète. Ils se sont aperçus par exemple que notre cerveau entérique, celui du ventre, produisait 95 % de la sérotonine, un neurotransmetteur qui participe à la gestion de nos émotions. On savait que ce que l'on ressentait pouvait agir sur notre système digestif. On découvre que l'inverse est vrai aussi : notre deuxième cerveau joue avec nos émotions.

Espoirs thérapeutiques

En outre, certaines découvertes ouvrent aujourd’hui d’immenses espoirs thérapeutiques. Des maladies neurodégénératives, comme Parkinson, pourraient trouver leur origine dans notre ventre. Elles commenceraient par s’attaquer aux neurones de notre intestin, hypothèse qui, si elle est vérifiée, débouchera peut-être sur un dépistage plus précoce. Plus étonnant encore, notre deuxième cerveau abrite une colonie spectaculaire de cent mille milliards de bactéries dont l’activité influence notre personnalité et nos choix, nous rend timides ou, au contraire, téméraires. Des États-Unis à la Chine en passant par la France, ce documentaire, nourri d'interviews et d'infographies éclairantes, passe en revue les recherches les plus récentes menées sur notre deuxième et intrigant cerveau.

cerveau ventre neurone
L’INTERACTION CERVEAU-INTESTIN

Michel Neunlist, Directeur de recherche à l’Institut des Maladies de l’Appareil Digestif (CHU de Nantes) nous parle des dernières avancées scientifiques concernant les relations entre intestin et cerveau, microbiote (flore intestinale) et maladies neurodégénératives. Il évoque aussi les perspectives thérapeutiques révolutionnaires liées à une meilleure connaissance des bactéries nichées au creux de notre ventre.

Michel Neunlist ventre cerveau
GREFFE DE MATIÈRE FÉCALE OU MÉDICAMENT ?

bactérie médicament ventre Michel Neunlist
DES PROBIOTIQUES POUR TRAITER L'AUTISME ?

Interview de Michel Neunlist sur le ventre 2
 Michel Neunlist - Des probiotiques pour traiter l'autisme ?
 Vendredi 28 août à 16h00 (1 min)
 

ventre autisme probiotique
MICROBIOTE ET MÉDECINE PERSONNALISÉE

Interview de Michel Neunlist sur le ventre 4
 Michel Neunlist - La science du ventre va-t-elle "personnaliser" la médecine
 
"le ventre est le principal conseiller de notre cerveau"

A  l’âge de 16 ans, Giulia Enders développe une maladie de peau. Surprise d’apprendre que c’est du à un dérèglement de ses intestins, elle s’y intéresse. Au début, le sujet lui paraît peu ragoûtant, mais très vite, elle le trouve passionnant et décide de s’y consacrer pleinement dans le cadre de ses études de médecine. Elle en fait même le sujet de sa thèse qu'elle présente lors d'un "Sciences-slam" et remporte le premier prix .Un éditeur propose alors à Giulia Enders de publier ses observations scientifiques. Sorti en 2014, « Le charme discret de l’intestin » devient rapidement un bestseller en Allemagne. Avec le concours de sa sœur Jill qui signe les illustrations de l’ouvrage, Giulia entraîne le lecteur dans un périple au fil de l’intestin. Traduit en trente langues, l’ouvrage rencontre un franc succès en France, car l’engouement de Giulia Enders pour notre intestin est contagieux.

Pourquoi sommes-nous fascinés par nos intestins ?

Je crois que les intestins sont une partie de notre corps dont nous avons peu conscience. Ils évoquent le passage aux toilettes, et c’est à peu près tout. Mais quand on sait qu’ils hébergent le deuxième système nerveux de notre organisme, après le cerveau, qu’ils produisent eux-mêmes une vingtaine d’hormones et qu’ils activent deux tiers de notre système immunitaire, on les voit subitement d’un autre œil.

Comment se fait-il qu’un nombre croissant de personnes s’intéressent à ce sujet, autrefois jugé répugnant ?

Je crois que les gens ont soif de connaissance. Ils ne veulent pas seulement qu’on leur dise ce qu’ils doivent manger ou non. Je pense qu’ils veulent aussi mieux comprendre le fonctionnement de leur corps, à une époque où l’on évolue dans des sphères virtuelles, assis devant un ordinateur. Nous voulons avoir une perception plus globale de ce qui se trame dans notre ventre et mieux comprendre certains aspects comme la digestion ou le rôle des colonies de bactéries qui peuplent nos intestins. Plus on en sait et moins on risque de « surréagir » quand on nous annonce un nouveau scénario catastrophe ou le dernier régime alimentaire à la mode.

Le documentaire diffusé sur ARTE s’intitule Le ventre, notre deuxième cerveau. L’intestin assume-t-il effectivement ce rôle ? Ou le ventre est-il même plus important que notre matière grise ?

Je dirais qu’il est le principal conseiller de notre cerveau. Notre cerveau centralise toutes les informations puis les structure. Mais il faut bien que ces informations proviennent de quelque part. L’intestin est notre organe sensoriel le plus important. Il compte plus de cellules nerveuses que nos yeux, nos oreilles ou notre peau. Si vous stimulez le nerf qui relie l’intestin au cerveau avec différentes fréquences, vous provoquez des réactions qui peuvent aller de la peur au bien-être. On dit souvent que l’on ressent les choses avec ses tripes : cette expression prend une toute nouvelle dimension avec les avancées scientifiques.

 Etonnamment, lors de mes visites dans les pays où mon livre est paru, j’assiste à des réactions identiques. A mon arrivée à l’aéroport, on me prévient qu’ici, la thématique est particulièrement taboue. Et quelques heures plus tard, nous nous entretenons gaiement de sujets comme la constipation. En Allemagne, des personnes se sont inspirées de mon livre pour développer quelques inventions comme un tabouret anti-constipation ou des mélanges à base de yaourt. La presse m’a souvent dit que l’axe intestin-cerveau était un concept trop complexe pour le grand public. En France, j’ai apprécié l’aisance avec laquelle le sujet est évoqué. On m’a posé de nombreuses questions autour de cette thématique. Je m’en réjouis

 
Qu’est-ce qui vous a le plus étonné lors de vos recherches ?

Tous ces petits détails qu’on ignore et qui, pourtant, sont utiles. Par exemple qu’il est plus facile de roter quand on est allongé sur le flanc gauche en raison de l’inclinaison de l’estomac. Mais la recherche fondamentale est également intéressante : le lien entre la flore intestinale et le diabète ou le fait que certaines bactéries permettent à des souris de rester minces même quand elles ingèrent des quantités de graisse plus importantes. Toutes ces informations sont autant de pièces d’un grand puzzle. Et plus on en possède, plus on y voit clair.


Sur quoi travaillez-vous actuellement ?

J’étudie la manière dont les bactéries colonisent notre organisme et comment éviter ce phénomène. Si les microbes ne parviennent pas à s’accrocher à nos cellules, ils n’ont aucune prise sur notre corps. Espérons qu’à l’avenir, nous pourrons développer des mécanismes capables de bloquer les bactéries indésirables plutôt que de les éradiquer avec des antibiotiques qui ruinent notre flore intestinale.


 Propos recueillis par Christin Schutta

 Giulia Enders : le charme de nos intestins

Comment présenter en quelques minutes un sujet de thèse sur les charmes de l’intestin? Voici la présentation réussie de Giulia Enders, 25 ans, doctorante en médecine, qui lui a permis de gagner le premier prix d’un Sciences Slam à Berlin en 2012.

L'INTELLIGENCE DU VENTRE

Info Sciences : notre cerveau serait sous l'influence des bactéries qui peuplent notre tube digestif.

ventre
LE VENTRE EN QUELQUES CHIFFRES

ventre cerveau neurone
GUÉRIR DES MALADIES MENTALES EN SOIGNANT L'INTESTIN ?

Interview avec le docteur Guillaume Fond

Notre intestin responsable de maladies mentales ? Autisme, trouble bipolaire, schizophrénie, dépression… Depuis 15 ans, des études s’accumulent pour montrer que des perturbations de la flore intestinale sont un facteur de déclenchement. Le docteur Guillaume Fond, psychiatre à l’hôpital Henri-Mondor et chercheur en psychiatrie à l’INSERM, a fait le bilan. Il parle désormais de psychomicrobiotique, un domaine de recherche en plein essor. Pour ARTE Future, il est revenu sur cette lente prise de conscience qui promet une révolution dans notre façon d'appréhender les maladies mentales.

Propos recueillis par Adrian Bonte.

Comment est née la psychomicrobiotique ?

Guillaume Fond : Suite au décryptage du génome humain, on a eu de grands espoirs pour expliquer toutes les maladies par la génétique. Mais, pourquoi, avec une même prédisposition génétique, les maladies ne se déclenchent que chez certaines personnes ? On se rend compte que c’est vraiment une interaction entre les gènes et l’environnement ; l’influence du microbiote est l’une des grandes hypothèses pour expliquer ces inégalités. La psychomicrobiotique, c’est l’étude des interactions entre le cerveau et le microbiote intestinal et c’est vraiment bidirectionnel. Par exemple, quand le cerveau dysfonctionne, il peut provoquer des diarrhées ou de la constipation.

Quand a-t-on commencé à prendre conscience de l’influence de ce microbiote ?

G.F. : C’est une montée en puissance depuis les années 2000. Il y a d’abord eu une étude importante sur des souris nées par césariennes en conditions stériles. En l’absence de colonisation bactérienne, elles développaient des troubles anxieux très sévères. Mais lorsqu’on leur administrait des probiotiques - des « bonnes bactéries » - pour coloniser leurs tubes digestifs, ces troubles disparaissaient. Par contre, si l’on tardait trop à administrer les bactéries, les troubles anxieux étaient irréversibles. Il y a donc une fenêtre temporelle où la colonisation du tube digestif est capitale pour le développement cérébral, et notamment du système du stress.

Et chez l’être humain ?

G.F. : En 1910 déjà, un médecin indiquait qu’il traitait des mélancolies avec des extraits de yaourt. Mais ce n’est qu’à partir de 2009 que l’on a commencé à faire des études et observer les premiers résultats sur l’humain. Une publication témoignait que les êtres humains pouvaient se répartir en trois groupes selon leur microbiote : on a alors parlé d’entéroype selon les espèces majoritaires dans l’intestin – Bacteroides, Prevotella ou Ruminococcus. Mais ce résultat reste encore controversé.
En ce moment, nous travaillons sur une comparaison entre des gens nés par césariennes et par voie naturelle chez les schizophrènes. Pour l’instant, nos résultats préliminaires sont complétement contre-intuitif : les personnes nées par césariennes sont plus minces. La flore vaginale de la mère joue un grand rôle dans la composition du microbiote, or chez ces personnes ce sont d’autres bactéries qui colonisent l’intestin. On sait que le microbiote se constitue principalement dans les trois premières années de la vie à partir de la naissance et dépend de l’allaitement.

Est-ce justement cette fenêtre temporelle de la colonisation qui explique qu’on ne devienne pas autiste à 30 ans ?

G.F. : Exactement, c’est une différence nette entre l’autisme et la schizophrénie : l’autisme est diagnostiqué avant l’âge de trois ans. On fait l’hypothèse d’un traumatisme immunologique ou infectieux qui impacterait le développement cérébral selon le terrain génétique de la personne. On retrouve en effet des gènes de vulnérabilité  chez les personnes schizophrènes ou autistes. Comme les anomalies sont retrouvées dans la fratrie d'enfants autistes, cela suggère aussi des facteurs environnementaux communs. On recherche donc tout ce qui est alimentaire : produits industriels, colorants. Par ailleurs, il y a plus de dix ans, des chercheurs ont montré que l’on pouvait faire disparaître les troubles autistiques grâce aux antibiotiques. Le résultat est assez extraordinaire, mais utiliser un antibiotique, c’est décapiter la flore intestinale. C’est trop dangereux, il y a des résistances, des effets secondaires et ça coute cher.

Comment a-t-on fait le lien entre les anomalies du microbiote et la santé mentale ?

G.F. : Il y a plusieurs voies qui connectent le tube digestif au cerveau : la synthèse de vitamines et de nutriments en général et celle du système sanguin avec la perméabilité du système intestinal… On a beaucoup d’argument pour dire que les pathologies mentales sont liées à des anomalies de la perméabilité intestinale. Une des fonctions du « bon » microbiote est justement de protéger la muqueuse intestinale. Donc dès que le microbiote commence à être perturbé, des molécules du tube digestif passeraient dans le sang et feraient dysfonctionner le cerveau et le reste des organes, y compris le cœur et le foie…
Par exemple, on traite certaines dépressions résistantes par des stimulations vagales, on met des pacemakers dans la cage thoracique pour aller stimuler le nerf vague. On pourrait faire l’hypothèse qu’un microbiote dysfonctionnel entraînerait un défaut de stimulation du nerf vague. Plutôt que d’aller stimuler le nerf vague, il faudrait remettre du microbiote fonctionnel. C’est la question des greffes fécales. Mais pour les maladies psychiatriques, on n’y est pas encore. Ça va demander beaucoup d’efforts et d’investigation…

Que faut-il attendre de ce nouveau pan de la médecine ?

G.F. : Pour l’instant les gens sont sceptiques et considèrent que c’est une mode. Un peu comme l’ulcère gastroduodénal. Jusque dans les années 80, on pensait que c’était à cause du stress et que seule la psychothérapie pouvait le soigner. Puis en 1982, deux chercheurs ont publié des résultats en disant que c’était dû à une bactérie. On pensait qu’aucune bactérie ne pouvait résister à l’acidité de l’estomac. Ils ont mis en évidence Helicobacter pylori, une bactérie responsable de 90% des ulcères. Depuis on sait les soigner.
De manière semblable, pourquoi avons-nous tant tardé à nous intéresser au microbiote ? Parce qu’on n’avait pas les techniques pour l’étudier. On commence à les avoir, mais ça reste compliqué car il y a différents types de microbiote selon l’endroit du tube digestif.
Je suis pourtant persuadé qu’on va trouver des choses. Il ne faut pas s’imaginer que tout est microbiote ; l’idée serait de dire que toutes les maladies mentales peuvent avoir une origine dans le microbiote, mais elles peuvent aussi avoir une origine ailleurs. Il ne faut pas s’imaginer que toutes les maladies se soigneront à partir de l’alimentation et des transplantations fécales, mais il est indispensable de regarder ce qu’il se passe dans notre tube digestif. C’est le potentiel énorme d’une terra incognita.

En savoir plus

Le Dr Guillaume travaille notamment pour les Centres Experts. En recueillant un maximum de données de patients souffrant de pathologies psychologiques, il prévoit de comparer leurs microbiotes.
Pour davantage de précisions sur le lien entre l'autisme et le microbiote, retrouvez l'interview vidéo du prix Nobel de médecine Luc Montagnier dans le dossier ARTE Future L'énigme de l'autisme. Il y propose notamment le traitement de l'autisme par les antibiotiques.
ventre cerveau autisme
LE MICROBIOTE, UN TRÉSOR INTESTINAL

Les enjeux médicaux liés au microbiote, les 100 000 milliards de bactéries de nos intestins, sont immenses. Diabète et obésité, cancers, maladies infectieuses ou auto-immunes… sont ainsi concernés. Nos bactéries intestinales, médicaments de demain?

Atteinte de mucoviscidose, cette jeune femme souffrait depuis décembre 2012 de diarrhées récurrentes liées à une infection par une redoutable bactérie, Clostridium difficile. En mai 2014, après l’échec de plusieurs traitements antibiotiques, elle a reçu une transplantation de microbiote fécal à l’hôpital Cochin (Paris). Singulier traitement : il consiste à introduire dans l’intestin du malade les selles d’un donneur sain. En l’occurrence, le père de cette jeune femme. Cette greffe a éradiqué l’infection.

« La première fois que nous avons entendu parler de greffe de matière fécale, c’était en mars 2013, lors d’une réunion de service à l’hôpital Cochin. Nous avons cru à un canular », avoue le docteur Rui Batista, membre de l’Académie de pharmacie. Mais ce traitement fait désormais l’objet de recommandations internationales : plus de huit fois sur dix, il vient à bout de cette infection à C. difficile.

ventre microbiote système digestif
LE MICROBIOTE INTESTINAL : C'EST QUOI?

Notre ventre, abri du système nerveux entérique, contient 200 millions de neurones, qui, selon des recherches récentes, joueraient un rôle sur l'ensemble de notre corps, en interaction avec le cerveau. Mais nos intestins abritent une autre richesse souvent sous-estimée : le microbiote intestinal, soit environ 100.000 milliards de bactéries. Ces dernières auraient un impact sur notre santé et pourraient devenir vecteur de soins.

Il pèse entre 1,5 et 2kg. Le microbiote intestinal – auparavant appelé flore intestinale - regroupe 100.000 milliards de bactéries, au cœur de notre organisme. Concrètement, cela correspond de dix à cent fois plus de bactéries que l'ensemble des cellules que contient notre organisme. Des centaines d'espèces de bactéries, influençant notre quotidien.

Joël Doré, directeur de recherches à l'INRA explique : « On distingue différents grands groupes de bactéries avec des fonctions différentes. Leurs rôles s'exercent au niveau des interfaces avec l'aliment, les bactéries de l'environnement ou les cellules humaines, notamment en terme de contribution à la dégradation des composés alimentaires. Certaines bactéries vont par exemple dégrader les fibres ou participer à la fermentation, contribuant ainsi aux sources d'énergie pour l'hôte. D'autres jouent un rôle de protection contre les bactéries pathogènes, d'autres encore stimulent le renouvellement de la paroi intestinale et du mucus ou nos systèmes de défenses naturelles. Elles ont donc un effet bénéfique sur la flore, l'intestin et l'organisme tout entier. »

Grâce à l'étude des selles, on peut désormais déterminer la composition de l'intestin. Chez l'être humain, le microbiote se classe en trois entéro-types différents, qui se dessinent dans les premières années de la vie. « Le rôle de la mère dans la constitution du microbiote intestinal est important. On retrouve des souches d'origine maternelle chez le nouveau-né, qui proviennent du microbiote intestinal et vaginal de la mère. Même si c'est simplifié, c'est un bagage, avec des éléments déterminants de ce que sera le microbiote de l'adulte », détaille Joël Doré. Il se stabilise vers trois ans et se régénère rapidement, même en cas de stress majeur, comme un traitement antibiotique par exemple. « Ensuite, si le microbiote est stable pendant la plus grande partie de la vie, on a l'impression qu'il y a une dérive chez la personne âgée ou très âgée. Avec néanmoins un impact des dérives des pratiques alimentaires. »

 Une source de diagnostique ?

Une étude du microbiote intestinal des individus permet par ailleurs de relever certaines anomalies ou maladies. Dans le cas, notamment, de certaines maladies immunes, métaboliques ou auto-immunes, « On a suspecté un lien avec le microbiote », rapporte Joël Doré. « Depuis les années 1990, à l'INRA, on étudie les maladies inflammatoires de l'intestin. Dans le cas de la maladie de Crohn, on a constaté une déviance du microbiote, avec des bactéries absentes ou sous-représentées. Dans le cas de plusieurs maladies immunes, on a noté un lien entre la détérioration de la composition du microbiote et l'installation des maladies chroniques. »

Dans le même ordre d'idée, des liens ont été mis en évidence entre les bactéries intestinales et le système nerveux central. Notamment sur la régulation du taux de sérotonine, elle-même, jouant sur notre humeur.  « On a constaté, par exemple, chez les souris, que le niveau d'anxiété pouvait être impacté par le microbiote. », explique Joël Doré. En les privant de certaines bactéries, ces souris avaient de gros troubles de la production de sérotonine, et étaient plus anxieuses que leurs congénères. A l'inverse, l'injection de microbiote améliorait la situation.

Ainsi, « les conséquences vont donc au-delà du système digestif », note Joël Doré. « Il y a presque dix ans, les équipes de Jeff Gordon avaient mis en évidence un lien avec l'obésité. Mais des études s'intéressent également aux conséquences du microbiote sur des maladies inflammatoires, le diabète ou encore les allergies. Donc des pathologies pas forcément centrées sur l'intestin. On explore aujourd'hui des maladies psychiatriques. »

 

De nouvelles pistes de traitement ?

Ces découvertes ouvrent donc de nouvelles pistes thérapeutiques, où les bactéries pourraient venir en complément des traitements actuels. Une des pistes les plus simples réside dans l'apport de bactéries vivantes, via les probiotiques, par exemple. Cependant, tous les produits laitiers enrichis en probiotiques n'ont pas fait – pour le moment en tout cas – leurs preuves, et ne peuvent être considérés comme des médicaments.

Dans le cas de pathologies plus lourdes, avec un microbiote fortement déséquilibré, des chercheurs australiens ont testé le transfert d'extraits fécaux de personnes saines dans l'intestin de patients malades. Cela s'applique notamment dans le cas de la lutte contre le Clostridium difficile.  En inoculant le microbiote d'un donneur, on procède ainsi à une transplantation de microbiote. Une piste explorée également en Europe, et qui pourrait s'étendre à d'autres pathologies.

 Oriane Raffin

 

DOCUMENT       future.arte.tv    LIEN


 

 
 
 
 

LA MÉMOIRE

 

Mémoire

Dossier réalisé en collaboration avec le Pr. Francis Eustache, Directeur de l'unité Inserm-EPHE-UCBN U1077 "Neuropsychologie et neuroanatomie fonctionnelle de la mémoire humaine" – Octobre 2014

La mémoire permet d'enregistrer des informations venant d'expériences et d'événements divers, de les conserver et de les restituer. Différents réseaux neuronaux sont impliqués dans différents types de mémorisation. La meilleure connaissance de ces processus améliorent la compréhension de certains troubles mnésiques et ouvrent la voie à des interventions possibles dans l’avenir.

La mémoire repose sur cinq systèmes de mémoire

Cette représentation de neuro-imagerie est un exemple de la technique dite de recalage interindividuel guidé par les sillons (DIffeomorphic Sulcal-based COrtical ou DISCO). © Inserm, G. Auzias/S. Baillet/O. Colliot
© Inserm, G. Auzias/S. Baillet/O. Colliot
Cette représentation de neuro-imagerie est un exemple de la technique dite de recalage interindividuel guidé par les sillons (DIffeomorphic Sulcal-based COrtical ou DISCO).

La mémoire se compose de cinq systèmes de mémoire impliquant des réseaux neuronaux distincts bien qu’interconnectés :

La mémoire de travail (à court terme) est au cœur du réseau.
La mémoire sémantique et la mémoire épisodique sont deux systèmes de représentation consciente à long terme.
La mémoire procédurale permet des automatismes inconscients.
La mémoire perceptive est liée aux sens.
Cet ensemble complexe est indispensable à l’identité, à l’expression, au savoir, aux connaissances, à la réflexion et même à la projection de chacun dans le futur.

La mémoire de travail

La mémoire de travail (ou mémoire à court terme) est en fait la mémoire du présent. Elle permet de retenir des informations pendant quelques secondes, voire quelques dizaines de secondes. Nous la sollicitons en permanence à chaque instant, par exemple pour retenir un numéro de téléphone le temps de le noter. Dans la plupart des cas, les mécanismes neurobiologiques associés à la mémoire de travail ne permettent pas le stockage à long terme de ce type d’informations : leur souvenir est vite oublié. Néanmoins, il existe des interactions entre le système de mémoire de travail et ceux de la mémoire à long terme. Elles permettent la mémorisation de certains événements et, ainsi, de se remémorer des souvenirs anciens face à certaines situations présentes, afin de mieux s’adapter.

7, le nombre magique
Le chiffre 7 serait le "nombre magique" de la mémoire de travail. Il s’agit du nombre d’éléments pouvant être mémorisés simultanément à court terme, avec une marge de plus ou moins deux événements.  En moyenne, nous sommes donc tous capables de retenir pendant quelques secondes entre 5 et 9 items. Par exemple, la suite [7, 9, 6, 4, 0, 9, 2] représente 7 chiffres. Elle peut aussi se lire [796, 409, 2] ce qui n’en représente plus que trois (et laisse la possibilité de retenir quatre autres items). De même, une suite de mots longs et compliqués comme [perroquet, colibri, araignée, diplodocus, chimpanzé, kangourou, ornithorynque] représente 7 mots que l’on peut retenir, bien qu’elle soit composée d’un bien plus grand nombre de lettres.
Divers procédés mnémotechniques utilisent cette propriété de notre cerveau pour élargir les capacités de la mémoire de travail.

La mémoire sémantique

La mémoire sémantique permet l’acquisition de connaissances générales sur soi (son histoire, sa personnalité) et le monde (géographie, politique, actualité, nature, relations sociales ou encore expérience professionnelle). C’est la mémoire du savoir et de la connaissance. Elle concerne des données personnelles accessibles à notre conscience et que l’on peut exprimer.

La mémoire épisodique

La mémoire épisodique est une forme de mémoire explicite. Elle permet de se souvenir de moments passés (événements autobiographiques) et de prévoir le lendemain. En effet, lorsqu’on demande à une personne d’évoquer un souvenir qui s’est déroulé au cours des derniers mois ou de penser aux prochaines vacances afin d’imaginer ce qui va s’y passer, ce sont les mêmes circuits cérébraux qui sont activés. Les détails des souvenirs épisodiques se perdent avec le temps (où, quand et comment l’événement s’est-il passé ?). Les traits communs aux différents événements vécus s’amalgament les uns aux autres pour devenir des connaissances qui ne sont plus liées à un événement particulier. La plupart des souvenirs épisodiques se transforment donc, à terme, en connaissances générales.

La mémoire procédurale

La mémoire procédurale est la mémoire des automatismes. Elle permet de conduire, de marcher, de faire du vélo ou du ski sans avoir à réapprendre à chaque fois. Cette mémoire est particulièrement sollicitée chez les artistes ou encore les sportifs pour acquérir des procédures parfaites et atteindre l’excellence. Ces processus sont effectués de façon implicite, c’est à dire inconsciente. La personne ne peut pas vraiment expliquer comment elle procède, pourquoi elle tient en équilibre sur ses skis ou descend sans tomber. Les mouvements se font sans contrôle conscient et les circuits neuronaux sont automatisés.

La mémoire perceptive

La mémoire perceptive dépend des modalités sensorielles, notamment de la vue pour l’espèce humaine. Cette mémoire fonctionne beaucoup à l’insu de l’individu. Elle permet de retenir des images ou des bruits sans s’en rendre compte. C’est elle qui permet à une personne de rentrer chez elle par habitude, grâce à des repères visuels. Cette mémoire permet de se souvenir des visages, des voix, des lieux.

La mémoire fonctionne en réseaux

Du point de vue neurologique, il n’existe pas "un" centre de la mémoire dans le cerveau. Les différents systèmes de mémoire mettent en jeu des réseaux neuronaux distincts, observables par imagerie médicale au cours de tâches de mémorisation ou de récupération d’informations diverses. Ces réseaux sont néanmoins interconnectés et fonctionnent en étroite collaboration : un même événement peut avoir des contenus sémantique et épisodique et une même information peut être représentée sous forme explicite et implicite.

Face latérale (à gauche) et face interne (à droite) de l'hémisphère cérébral droit. © Inserm, F. Koulikoff


La mémoire procédurale recrute des réseaux neuronaux sous-corticaux et dans le cervelet.

La mémoire sémantique implique des réseaux neuronaux disséminés dans des régions très étendues ainsi que dans les lobes temporaux, notamment dans leurs parties les plus antérieures.

La mémoire épisodique fait appel à des réseaux neuronaux dans l’hippocampe et plus largement dans la face interne des lobes temporaux.

Enfin, la mémoire perceptive recrute des réseaux neuronaux dans différentes régions corticales, à proximité des aires sensorielles.

Des souvenirs multiples naissent les raisonnements
Les mémoires s’appuient les unes sur les autres ! Si vous savez qu'un 4x4 est une voiture, vous pouvez dire qu'un 4X4 a des freins, même si personne ne vous l’a dit et que vous ne les avez jamais vus. Vous déduisez cela du fait que toutes les voitures ont des freins. Ce type de raisonnement utile dans la vie quotidienne se fait essentiellement à partir des connaissances stockées en mémoire. Ainsi, plus les connaissances mémorisées sont importantes, plus il est facile de faire des analogies.

Encodage et stockage de l’information, une affaire de plasticité synaptique

L'activation de l'hippocampe se maintient pour les souvenirs épisodiques, mais baisse quand les souvenirs se sémantisent. © Inserm, C. Harand
© Inserm, C. Harand
L'activation de l'hippocampe se maintient pour les souvenirs épisodiques, mais baisse quand les souvenirs se sémantisent.

Les processus de stockage sont difficiles à observer par imagerie cérébrale car ils relèvent de mécanismes de consolidation qui s’inscrivent dans la durée. Néanmoins, l’hippocampe semble jouer un rôle central dans le stockage temporaire et plus durable des informations explicites, en lien avec différentes structures corticales.

La mémorisation résulte d’une modification des connexions entre les neurones d’un système de mémoire : on parle de « plasticité synaptique » (les synapses étant les points de contacts entre les neurones). Lorsqu’une information parvient à un neurone, des protéines sont produites et acheminées vers les synapses afin de les renforcer ou d’en créer de nouvelles. Cela produit un réseau spécifique de neurones associé au souvenir qui se grave dans le cortex. Chaque souvenir correspond donc à une configuration unique d’activité spatio-temporelle de neurones interconnectés. Les représentations finissent par être réparties au sein de vastes réseaux de neurones d’une extrême complexité.

L’activation régulière et répétée de ces réseaux permettrait dans un second temps de renforcer ou de réduire ces connexions, avec pour conséquence de consolider le souvenir ou au contraire de l’oublier. Il est important de préciser que l’oubli est associé au bon fonctionnement de la mémoire en dehors de cas pathologiques. Des travaux suggèrent le rôle d’une molécule appelée PKM zêta dans le maintien de la mémoire à long terme. Chez l’animal, elle permet d’entretenir les molécules modifiées pendant l’encodage et d’empêcher qu’elles ne se dégradent avec le temps, consolidant ainsi les réseaux associés aux souvenirs.

La libération de neurotransmetteurs, notamment celle de glutamate et de NMDA, ainsi que l’expression d’une protéine qui augmente la libération de glutamate, la syntaxine,  sont associées à la plasticité synaptique.  Sur le plan morphologique, cette plasticité est associée à des remaniements des réseaux neuronaux : changement de forme et de taille des synapses, transformation de synapses silencieuses en synapses actives, croissance de nouvelles synapses.

Au cours du vieillissement, la plasticité des synapses diminue et les changements de connexions sont plus éphémères, pouvant expliquer des difficultés croissantes à retenir des informations. Par ailleurs, dans les rares formes familiales de la maladie d’Alzheimer, des mutations sont associées à des défauts de plasticité des synapses qui pourraient expliquer, dans ce cas, les troubles majeurs de mémoire.

Le sommeil consolide la mémoire
Une leçon s’apprend mieux le soir avant de dormir, c’est un fait ! Des expériences de rappel d’informations montrent que le fait de dormir améliore la mémorisation, et ce d’autant plus que la durée du sommeil est longue. A l’inverse, des privations de sommeil (moins de quatre ou cinq heures par nuit) sont associées à des troubles de la mémoire et des difficultés d’apprentissage. Par ailleurs, le fait de stimuler électriquement le cerveau (stimulations de 0,75 Hz) pendant la phase de sommeil lent (caractérisée par l’enregistrement d’ondes corticales lentes à l’encéphalogramme) améliore les capacités de mémorisation d’une liste de mots.
Plusieurs hypothèses pourraient expliquer ce phénomène : Pendant le sommeil, l’hippocampe est au repos et cela éviterait des interférences avec d’autres informations au moment de l’encodage du souvenir. Il se pourrait aussi que le sommeil exerce un tri, débarrassant les souvenirs de leur composante émotionnelle pour ne retenir que l’informationnelle, facilitant ainsi l’encodage.

Recherche à suivre : une série de clips des année 90. Alerte : le voleur de la formule secrète a prit la fuite. Fureur dans les neurones : il doit la mémoriser au plus vite avant de se faire fouiller. mais... comment fonctionne la mémoire ? Ce dessin animé de 1990 explique la trace amnésique et les relations entre les neurones.

La réserve cognitive, soutien de la mémoire

Les chercheurs découvrent progressivement des facteurs qui accroissent les capacités de mémorisation et semblent stabiliser les souvenirs dans le temps. C’est le cas de la réserve cognitive : un phénomène associé à des connections fonctionnelles entre les neurones extrêmement nombreuses, résultant des apprentissages, d’une stimulation intellectuelle tout au long de la vie ou encore des relations sociales épanouies.

A ce jour les chercheurs ne savent pas précisément quels ingrédients éducationnels et sociaux participent précisément à la constitution de cette réserve cognitive. Des études menées chez les rongeurs montrent cependant que le séjour d'animaux dans des environnements complexes (dits « enrichis ») améliore leur capacité d'apprentissage et de mémoire. D’autres travaux, conduits chez l’Homme, indiquent que les personnes qui ont un haut degré d’éducation, développent les symptômes de la maladie d’Alzheimer plus tardivement que les personnes qui n’ont pas fait d’études. Ces résultats, issus de recherches en épidémiologie portant sur de très grands nombres de sujets, s’expliqueraient par la capacité du cerveau à compenser les dégénérescences neuronales liées à la maladie grâce à la mobilisation de circuits alternatifs, du fait d’un meilleur réseau de connexions entre les neurones chez les personnes qui ont un niveau d’éducation élevé.

D’autres facteurs contribuent à la consolidation de la mémoire sans que l’on en connaisse parfaitement les mécanismes : le sommeil (voir plus haut), l’activité physique ou encore une bonne santé cardiovasculaire. De façon générale une bonne hygiène de vie (sommeil, alimentation, activité physique) contribue à de bonnes capacités de mémorisation.

Les multiples troubles de la mémoire

Les troubles de la mémoire altèrent principalement la capacité à mémoriser un fait nouveau, à retrouver une information, ou les deux.

Les causes possibles

Certaines situations entrainent des incapacités sévères et des amnésies durables. Les causes possibles sont :

un traumatisme physique entrainant des lésions cérébrales,
un accident vasculaire cérébral hémorragique ou ischémique,
une tumeur du cerveau
ou encore une dégénérescence neuronale comme la maladie d’Alzheimer.
Dans d’autres cas, les troubles sont moins sévères et le plus souvent réversibles. Les causes possibles sont :

des maladies mentales comme la dépression,
le stress et l’anxiété ou la fatigue,
un événement traumatisant (deuil),
des effets indésirables de médicaments comme des somnifères, des anxiolytiques (d’autant plus fréquent que la personne est âgée),
l’usage de drogues.
Il existe aussi probablement des origines biologiques comme un déficit en certains neuromédiateurs ou une faible connectivité entre les réseaux cérébraux.

Une multitude de troubles

Les manifestations des troubles de la mémoire sont extrêmement variables selon l’origine du trouble et la localisation de la zone touchée. Les mécanismes sont éminemment complexes.

Zones atrophiées dans la maladie d’Alzheimer (en haut), dans la démence sémantique (au milieu) et, de façon commune, dans ces deux pathologies. Les flèches rouges indiquent la région commune hippocampique affectée par ces démences. © Inserm, R. La Joie/U1077
© Inserm, R. La Joie/U1077
Zones atrophiées dans la maladie d’Alzheimer (en haut), dans la démence sémantique (au milieu) et, de façon commune, dans ces deux pathologies. Les flèches rouges indiquent la région commune hippocampique affectée par ces démences.

Les travaux montrent par exemple que des patients atteints d’une démence sémantique, qui oublient des mots ou des informations, perdent également des souvenirs anciens alors qu’ils continuent à mémoriser de nouveaux souvenirs épisodiques (souvenirs « au jour le jour »). Ces troubles sont associés à une atrophie des lobes temporaux.

Chez d’autres patients présentant des troubles de la mémoire épisodique, les souvenirs anciens qui datent de l’adolescence sont épargnés plus longtemps que les souvenirs récents. C’est le cas chez les personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer.

Les dégénérescences neuronales qui surviennent dans les maladies de Parkinson ou de Huntington provoquent  d’autres types de déficiences, affectant notamment la mémoire procédurale avec la perte de certains automatismes.

Certaines personnes peuvent aussi présenter des troubles de la mémoire du travail, liées à des lésions du lobe frontal. L’individu a alors du mal à se concentrer et à faire deux taches en même temps.

Il existe aussi des troubles de la mémoire sévères mais transitoires, comme dans l’ictus amnésique idiopathique qui survient le plus souvent entre 50 et 70 ans. Il s’agit d’une amnésie soudaine et massive, qui dure environ six à huit heures, puis le patient recouvre sa mémoire. Pendant la phase aigue, le patient est incapable de se souvenir de ce qu’il vient de faire, sa mémoire épisodique est annihilée alors que sa mémoire sémantique est intacte : il peut répondre à des questions de vocabulaire et évoquer des connaissances générales.

A l’inverse, certaines personnes peuvent être atteintes d’hypermnésie autobiographique. Il s’agit d’une pathologie très rare qui se caractérise par des capacités de mémorisation exceptionnelles des détails d’événements personnels ou de l’actualité, survenus parfois plusieurs années avant. Il s’agit d’une pathologie de l’abstraction et de la généralisation du souvenir avec absence de tri, de synthèse et d’oubli de détails.

L’état de stress post-traumatique : une distorsion de la mémoire
 L’état de stress post-traumatique survient chez une personne victime ou témoin impuissant d’un événement traumatique. Elle est ensuite hantée durablement par cet événement. Ce phénomène est lié à une distorsion profonde de l’encodage des événements. Le souvenir est mémorisé à long terme mais de façon biaisée, avec une amnésie de certains aspects et une hypermnésie d’autres détails qui harcèlent le sujet. Contrairement à un souvenir normal, il persiste au cours du temps sans s’édulcorer ni perdre de sa spécificité. Il s’impose à la victime face à des événements déclencheurs qui lui rappellent la scène. Cette distorsion de l’encodage est associée à une décharge de glucocorticoïdes, hormone du stress, dans l’hippocampe au moment de l’événement.

Une recherche plurisciplinaire

L'iimagerie cérébrale, tomographie par émission de positons, permet d'étudier le fonctionnement de la mémoire.© Inserm/U923
© Inserm/U923
L'iimagerie cérébrale, tomographie par émission de positons, permet d'étudier le fonctionnement de la mémoire.

La mémoire et ses troubles donnent lieu à de nombreuses recherches qui font appel à des expertises variées dans un cadre pluridisciplinaire : génétique, neurobiologie, neuropsychologie, électrophysiologie, imagerie fonctionnelle, épidémiologie, différentes disciplines médicales (neurologie, psychiatrie…), mais aussi sciences humaines et sociales.

L’imagerie fonctionnelle est très informative puisqu’elle permet de savoir quelles zones du cerveau s’activent pendant différentes taches de mémorisation et de restitution simples ou complexes (réciter une liste de mots, évoquer un souvenir précis dans le détail…). En parallèle les chercheurs étudient le cerveau « au repos » afin d’observer les réseaux cérébraux impliqués dans les pensées internes et leurs interconnexions en dehors d’un effort de mémorisation. Des travaux ont montré qu’il est altéré notamment chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer.

L’optogénétique permet par ailleurs de mieux comprendre l’implication de certains neurones dans ces réseaux sur des modèles animaux. Cette technique qui associe génie génétique et optique permet « d’allumer » et « d’éteindre » des neurones sur commande et d’en observer l’effet sur la mémorisation, le stockage et la restitution des informations. Il devient donc possible de manipuler la mémoire et l’oubli expérimentalement pendant des tâches de mémorisation, pendant le sommeil, au repos, en réactivant ou en effaçant des souvenirs, ou encore en agissant sur la molécule PKM zêta qui serait responsable du maintien de la mémoire à long terme. Menés aux niveaux cellulaire et moléculaire, ces travaux ouvrent la voie à des perspectives thérapeutiques, notamment pour les victimes de stress post-traumatique.

Les sciences humaines et sociales, comme l’histoire et la sociologie, s’intéressent à la mémoire collective, à comment celle-ci se construit progressivement pour conférer une identité à une communauté. Ces études sont rapprochées de celles menées en psychologie et en neurosciences, cette fois-ci au plan individuel, pour mettre en lumière les mécanismes à l’origine du maintien ou de l’oubli de certains événements.

 

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MALADIE AUTO-IMMUNE 3

 

Maladies auto-immunes

Dossier réalisé en collaboration avec les Pr Olivier Boyer et François Tron, Unité 905 Inserm/Université de Rouen, Physiopathologie et biothérapies des maladies inflammatoires et autoimmunes & Laboratoire d'immuno-pathologie clinique et expérimentale du CHU de Rouen - Décembre 2012.

Les maladies auto-immunes résultent d'un dysfonctionnement du système immunitaire qui s’attaque aux constituants normaux de l’organisme, ou « auto-antigènes ». C’est par exemple le cas du diabète de type 1, de la sclérose en plaques ou encore de la polyarthrite rhumatoïde.

Un système immunitaire pathogène


Normalement, le système immunitaire défend l’organisme vis-à-vis d’agressions extérieures et tolère ses propres constituants. Les maladies auto-immunes surviennent quand cette tolérance se rompt. Le système immunitaire devient alors pathogène et induit des lésions tissulaires ou cellulaires. Ces maladies évoluent de façon chronique tout au long de la vie, avec des phases de poussées et de rémissions.

Maladies systémiques et maladies spécifiques d'organe

Les maladies auto-immunes sont des pathologies hétérogènes. Elles sont classées en deux groupes : les maladies spécifiques d’organes et les maladies plus systémiques.
Dans le premier cas, le système immunitaire attaque les auto-antigènes spécifiques d’un organe donné, comme le pancréas dans le diabète de type 1 ou le cerveau dans la sclérose en plaques.
Dans le second cas, des auto-antigènes attaqués sont partagés par toutes les cellules de l’organisme, comme dans le lupus érythémateux systémique. En général, la thyroïde, les surrénales, l’estomac et le pancréas sont des organes touchés dans des maladies spécifiques d’un organe. La peau, les reins, les articulations et les muscles sont davantage impliqués dans les maladies systémiques.

Néanmoins, il existe souvent des chevauchements entre ces deux groupes.

 
L’allergie n’est pas une maladie auto-immune
Les allergies et les maladies auto-immunes se caractérisent toutes les deux par une réponse inappropriée du système immunitaire. Les maladies auto-immunes sont caractérisées par une réponse dirigée contre des composants normaux de l'organisme (auto-antigènes) alors que les allergies sont déclenchées par des substances exogènes de l'environnement comme des pollens, des médicaments, des produits chimiques... Leurs mécanismes intimes sont en outre différents.

Des  maladies  de  prévalence  croissante
Certaines maladies auto-immunes sont rares, atteignant moins d’un cas pour 6 000 habitants. Mais prises dans leur ensemble, elles sont fréquentes et leur prévalence est en augmentation constante. La plus fréquente d’entre elles est la thyroïdite auto-immune : elle concernerait 3 à 5 % des femmes.

Les maladies auto-immunes touchent en effet préférentiellement les femmes. Ainsi, plus de 80% des cas de lupus érythémateux systémique concernent des femmes. Le rôle des hormones sexuelles féminines rend compte, en majeure partie, de cette observation.

Une éducation du système immunitaire pour contrôler l'auto-immunité

Il existe un certain degré d'auto-réactivité naturelle du système immunitaire. Cela signifie que, chez un individu normal, des lymphocytes B producteurs d’anticorps et les lymphocytes T reconnaissent nos propres cellules et leurs composants (ADN, protéines, noyaux cellulaires…) sans pour autant s’attaquer à eux. Le contrôle de l’autoréactivité, dans sa fréquence et son intensité, est lié à un processus « d’éducation ». Celui-ci a lieu dans le thymus pour les lymphocytes T, et dans la moelle osseuse pour les lymphocytes B (tolérance centrale). Il permet d’éliminer les lymphocytes fortement auto-réactifs. Mais ce processus n'est que partiel. Des mécanismes complémentaires (tolérance périphérique) permettent de contrôler les lymphocytes auto-réactifs qui auraient échappé à ce processus central. Ces mécanismes sont variés : ils peuvent passer par la production de cytokines anti-inflammatoires, l’activité de cellules de contrôle appelées lymphocytes T ou B régulateurs, la séquestration d’auto-antigènes dans des tissus ou des régions auxquels les lymphocytes n’ont pas accès (par exemple les cellules du cristallin de l’œil), ou encore par l’indifférence des lymphocytes autoréactifs vis-à-vis des auto-antigènes…

C’est l’altération d’un ou de plusieurs de ces mécanismes qui entraine la prolifération de lymphocytes autoréactifs et l’apparition d’une maladie auto-immune.

Maladie auto-immune, la rupture de la tolérance au soi

Une maladie auto-immune survient quand les mécanismes de tolérance au soi deviennent défaillants, permettant aux lymphocytes autoréactifs d’attaquer les constituants de l’organisme. L’origine de cette rupture reste le plus souvent énigmatique. Il s’agit probablement de l’association de plusieurs facteurs génétiques, endogènes et environnementaux. On parle de maladie multifactorielle.

Les facteurs génétiques

Le terrain génétique est important, ce que souligne le caractère familial fréquent des maladies auto-immunes. Ainsi, dans le diabète de type 1, la fréquence de la maladie est de 0,4 % dans la population générale et de 5 % chez les apparentés.

Plusieurs gènes impliqués dans le fonctionnement du système immunitaire jouent un rôle important. C’est le cas des gènes HLA. Ils codent pour des protéines présentes à la surface des cellules et forgent l’identité biologique de l’individu. L’allèle HLA-B27 est ainsi observé chez plus de 90 % des malades atteints de spondylarthrite ankylosante alors qu’il n’est présent que chez 8 % des sujets sains. De même, il existe une forte association entre la polyarthrite rhumatoïde et l’allèle HLA-DR4 ou encore la maladie cœliaque et l’allèle HLA-DQ2.

Le plus souvent, les maladies auto-immunes d’origine génétique sont liées à l’association de plusieurs particularités génétiques : les cas dont la survenue est liée à la mutation d’un seul gène sont très rares. C'est néanmoins le cas de la polyendocrinopathie auto-immune type 1 (APECED) ou de l’entéropathie auto-immune de type 1 (IPEX). La première est liée à une mutation du gène AIRE qui entraine un défaut de tolérance centrale et la seconde est causée par une mutation du gène FoxP3 qui bloque la production de lymphocytes T régulateurs. Dans ces formes extrêmes, l'auto-immunité se développe dès l'enfance et les atteintes tissulaires sont multiples et graves.

Les facteurs endogènes et environnementaux

Parmi les autres facteurs susceptibles de contribuer au déclenchement de maladies auto-immunes, citons les facteurs endogènes comme les hormones, une inflammation chronique ou encore la libération d’auto-antigènes normalement séquestrés. Les facteurs exogènes comme des virus, des bactéries ou certains médicaments jouent également un rôle important.

La théorie de l’hygiène
Les populations vivant dans des pays développés à haut niveau d’hygiène développent davantage d’allergies et de maladies auto-immunes. Ce constat incite certains scientifiques à considérer que l’hygiène et l'utilisation des antibiotiques favoriseraient l’essor de ces maladies dans des populations de moins en moins soumises à l'épreuve des infections. L’effet protecteur de ces infections n’est pas élucidé, mais il pourrait faire intervenir la production de lymphocytes T régulateurs et de cytokines régulatrices.

Des mécanismes pathogènes bien identifiés

Suivant la maladie, les lésions qu’elle induit peuvent relever d’un seul ou de plusieurs des mécanismes pathologiques :

Les mécanismes liés aux lymphocytes T auto-réactifs

Les lymphocytes T auto-réactifs induisent des lésions cellulaires par différents mécanismes de toxicité (libération de molécules nocives pour les cellules, induction directe de la mort de la cellule cible…). L’identification de l’auto-antigène ciblé par le système immunitaire est alors cruciale pour la compréhension du mécanisme de la maladie.

Les mécanismes liés aux auto-anticorps
Les auto-anticorps produits par les lymphocytes B ont aussi une action pathogène : on observe une toxicité vis-à-vis des globules rouges dans les anémies hémolytiques auto-immunes, la formation de complexes immuns (« attaques » des anticorps) en cas de néphropathies glomérulaires du lupus, ou encore des interactions avec des récepteurs cellulaires comme dans le cas de la myasthénie (anticorps anti-récepteur de l’acétylcholine) ou dans l’hyperthyroïdie (anticorps anti-récepteur de la TSH). Autre exemple : des auto-anticorps dirigés contre des phospholipides peuvent interférer avec des facteurs de la coagulation sanguine.

Certains auto-anticorps peuvent être transmis de la femme enceinte à l'enfant qu'elle porte, via le placenta. C’est le cas des anticorps dirigés contre le récepteur de l’acétylcholine dans la myasthénie. L’enfant présente alors les symptômes de la maladie à la naissance, mais ils disparaissent lorsque les anticorps maternels sont éliminés, au cours des premières semaines de vie.

 
Les mécanismes liés aux cytokines

La sécrétion anormale de cytokines joue aussi un rôle, en favorisant l’inflammation et la dérégulation de l’immunité. Il peut notamment s’agir de cytokines pro-inflammatoires comme l’interleukine-1 ou le facteur TNF alpha, impliqués dans la polyarthrite rhumatoïde.

Maladie auto-immune, un diagnostic par étapes

Le diagnostic d’une maladie auto-immune repose sur plusieurs éléments cliniques, immunologiques et parfois génétiques :

- Les symptômes cliniques permettent d’évoquer une maladie auto-immune. L’imagerie médicale complète l’examen clinique et caractérise les lésions des organes cibles: par exemple, la survenue répétée de déficits neurologiques accompagnée de lésions démyélinisantes du cerveau à l'IRM permet d’évoquer une sclérose en plaques.

- Le diagnostic immunologique au laboratoire consiste à rechercher des auto-anticorps spécifiques de la maladie: par exemple, anticorps anti-ADN natif au cours du lupus érythémateux systémique, anti-récepteur de l’acétylcholine au cours de la myasthénie ou anti-protéines citrullinées au cours de la polyarthrite rhumatoïde. Dans certaines maladies comme la sclérose en plaques, il n’y a pas d’auto-anticorps spécifiques mais l’analyse du liquide céphalorachidien peut détecter une surproduction d’immunoglobulines.

- Le diagnostic génétique permet d’identifier des gènes de susceptibilité, par exemple HLA-B27 chez les patients suspectés de spondylarthrite ankylosante.

Des traitements immunosuppresseurs aux thérapies ciblées

Les traitements des maladies auto-immunes ont globalement pour objectif de contrôler et réduire la réponse immunitaire et l’inflammation. Ils doivent être pris sur le long terme et ne permettent pas de guérir la maladie. Ils contrôlent les poussées et les manifestations cliniques de la maladie.

Le diabète de type 1 ou diabète insulinodépendant (DID), est due à la destruction des cellules endocrines productrices d'insuline, appelées cellules ß (un type cellulaire particulier des îlots de Langerhans, dispersés dans le pancréas). On observe sur ce modèle animal (rat BB) une infiltration lymphocytaire au pôle vasculaire de l'îlot de Langerhans (insulite). Cette agression des cellules immunitaires contre les cellules ß de l'organisme définit une pathologie de type auto-immunitaire. Elle entraîne l'atrophie et la perte de fonctionnalité de la région. Lorsque les cellules des îlots de Langerhans ne parviennent plus à produire de l'insuline, le taux de sucre (glucose) dans le sang n'est plus régulé et l'hyperglycémie se développe.


Ces traitements reposent sur l’utilisation de médicaments immunosuppresseurs, qui agissent de façon non spécifique sur le système immunitaire. Ils associent habituellement la corticothérapie et d'autres molécules comme la cyclophosphamide, le méthotrexate, l’azathioprine, la ciclosporine...

La plasmaphérèse est parfois utilisée pour diminuer la concentration d'auto-anticorps dans le sang des patients atteints, par exemple, de myasthénie ou du syndrome de Guillain-Barré. Cette technique consiste à filtrer le sang des patients, de sorte à retenir une fraction riche en immunoglobulines (anticorps) et à réinjecter les globules blancs et rouges. La stratégie n'a qu'un effet partiel et transitoire.

L’utilisation d’immunoglobulines intraveineuses peut également être utile dans certaines situations. Un mélange d’immunoglobulines constitué à partir du sang d’environ 1 000 donneurs sains permet d’obtenir un produit aux propriétés immunorégulatrices efficaces, susceptible de neutraliser les anticorps pathogènes ou de réguler la production d’auto-anticorps. Cependant, cette approche n’est pas toujours efficace.

Des biomédicaments sont disponibles pour traiter certaines maladies auto-immunes. On parle de biomédicaments car leur principe de fabrication repose sur la biologie et non sur la chimie. Il s’agit molécules (anticorps monoclonaux ou analogues de récepteurs solubles) qui ciblent des substances impliquées dans le processus pathologique, par exemple le TNF-alpha dans la polyarthrite rhumatoïde, la maladie de Crohn ou le psoriasis, ou encore l’interféron alpha dans le lupus érythémateux systémique. Ces médicaments ont parfois une efficacité spectaculaire. Plus d'une vingtaine de nouveaux biomédicaments sont actuellement en développement dans le monde.

L’ensemble de ces traitements limitent l'activation du système immunitaire. Ils augmentent donc le risque d’infection et nécessitent en conséquence un suivi régulier.

La recherche : des molécules ciblées à la thérapie cellulaire

De nombreux biomédicaments sont déjà sur le marché et d’autres sont en cours de développement. Certaines molécules sont dirigées contre de nouvelles cytokines pro-inflammatoires telle que l'IL-17, active dans la polyarthrite rhumatoïde et les myosites. D’autres sont dirigées contre les lymphocytes B (rituximab) et ont déjà démontré une efficacité certaine. D’autres encore ciblent des « facteurs de costimulation » nécessaires à l’activation des lymphocytes T auto-réactifs (abatacept, déjà utilisés en transplantation d'organe), ou bloquent la migration des lymphocytes vers les organes ciblés par la maladie (sphingolimod).

Pour identifier de nouvelles cibles thérapeutiques, les chercheurs travaillent activement à l’identification des mécanismes en cause dans les différentes maladies auto-immunes. Ils disposent pour cela de modèles animaux reproduisant presque toutes ces pathologies, de façon spontanée ou induite. L’exemple les plus connu est probablement celui des souris NOD, qui développent spontanément un diabète auto-immun ressemblant à celui de l'homme.

Les chercheurs tentent également d’identifier de nouveaux biomarqueurs, le plus souvent des auto-anticorps spécifiques d’une maladie, pour améliorer le diagnostic de ces pathologies et mieux évaluer l’efficacité des traitements. Tout récemment, un progrès a été effectué dans la sclérose en plaques : des chercheurs ont pour la première fois découvert dans cette maladie des auto-anticorps dirigés contre un canal potassique de la membrane cellulaire, empêchant ce dernier de jouer son rôle dans la transmission des influx nerveux.

Des équipes travaillent également sur une autre stratégie thérapeutique : la thérapie cellulaire. L’objectif est de restaurer la fonction d’organes lésés en y injectant des cellules souches capables de se différencier et de fonctionner localement. Ainsi, le Centre hospitalier universitaire de Montpellier coordonne un programme ADIPOA destiné à tester cette technique dans l'arthrose. Les scientifiques travaillent avec des cellules souches mésenchymateuses (présentes dans la moelle osseuse et le tissu adipeux) qui sont injectées dans les articulations des patients. L’objectif est que ces cellules souches se différencient en cellules du cartilage et restaurent la fonction des articulations. Ces cellules pourraient avoir également des propriétés immuno-régulatrices, particulièrement intéressantes dans le cadre de la prise en charge des maladies auto-immunes.

Enfin, d’autres chercheurs s’intéressent au microbiote (flore bactérienne) des patients. Certaines données suggèrent en effet que la composition de la flore intestinale des personnes atteintes de maladie auto-immunes jouerait un rôle dans l’inflammation et la régulation du système immunitaire. C’est le cas dans la sclérose en plaques ou la maladie cœliaque.

L’interleukine 2 régule la réponse immunitaire
Une équipe de l’Inserm a récemment expérimenté avec succès l’utilisation de l’interleukine 2 chez des patients présentant des vascularites liées à une infection par le virus de l’hépatite C. En injectant de petites doses d’interleukine 2 chez ces patients, ils ont réussi à stimuler sélectivement la population de lymphocytes T régulateurs impliquée dans la modération de la réponse immunitaire et à améliorer les symptômes chez les patients. Une première quand on sait que l’interleukine 2 utilisée à haute dose pour lutter contre certains cancers est toxique et que son administration risquait en parallèle de stimuler les lymphocytes T effecteurs responsables de la maladie. Des nouveaux essais doivent venir conforter ces premiers résultats.
Source : David Saadoun, Michelle Rosenzwajg, Florence Joly, Adrien Six, Fabrice Carrat, Vincent Thibault, Damien Sene, Patrice Cacoub, David Klatzmann. Efficacy of low-dose IL-2 in HCV-vasculitis. N Engl J Med 2011;365:2067-77.

 

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